1ère édition de «Les écrans de Hammamet» au CCIH et au théâtre de Hammamet : Au gré des essais filmiques

8 / 10 / 2024REPORTAGES1ère édition de «Les écrans de Hammamet» au CCIH et au théâtre de Hammamet : Au gré des essais filmiques

Après le clap de fin de la 58e édition du festival international de la ville de Hammamet, le théâtre et son centre culturel «Dar Sebastian» accueillent une manifestation cinématographique titrée «Les écrans de Hammamet», sous la houlette du ministère des Affaires culturelles et du Cnci.


Sur une durée de 7 jours, le théâtre a vécu au rythme d’installations d’œuvres vidéo, de conférences mais surtout de projections nocturnes de courts et de longs métrages tunisiens, anciens et… inédits ! Car l’événement laisse libre cours à la réalisation et initie des jeunes talents à la fabrication de films courts de 3 à 5 min, en utilisant le smartphone. Focus sur le «Mobile Movie», qui a permis à 8 nouveaux films de voir le jour et d’être en compétition jusqu’au 11 août 2024. Le public, suite à un vote au quotidien, pourra élire la meilleure réalisation, en attribuant des étoiles sur un écran numérique.


En présence d’un jury formé par la réalisatrice Salma Baccar, l’artiste visuelle, cinéaste et chercheure Sahar El Echi, et la réalisatrice Emna Najjar, les participants ont élaboré des scénarios, qui ont pour thématique «Le théâtre de Hammamet, son histoire, celle du festival et de la villa Sebastian».


Arrêt sur 8 histoires, 8 films courts, 8 découvertes sur grand écran, en première !

«Champ contre champ» de Nermine Ben Hmida, rencontre intemporelle


Du haut de ses 18 ans, Nermine Ben Hmida, dans son premier film, décide de braquer la caméra du smartphone sur deux actrices tunisiennes : Mouna Noureddine, pionnière de la scène théâtrale et de la télévision tunisiennes, et Ibaa Hamli. Les deux sont issues de deux générations totalement différentes. «Champ contre champ » ne les compare sans doute pas. Il revient sur un projet théâtral récent qui a croisé leurs deux parcours, celui d’«Othello et après» de Hammadi Louhaïbi, présentée pour la première fois à l’ouverture de la 58e édition du festival international de Hammamet. Il s’agit d’une version revisitée, d’«Othello» d’Ali ben Ayed, initialement présentée en 1964, sur cette même scène, année de la création du festival. 60 ans plus tôt Mouna Noureddine était à l’affiche, dans le rôle d’«Emilia». En 2024, ce même rôle est campé par Ibaa Hamli. La jeune réalisatrice est revenue brièvement sur la rencontre des deux interprètes. Plongée rapide dans les coulisses, retour sur des archives photos, évocation de souvenirs lointains et aboutissement sur une rencontre entre les deux interprètes. Un mini– hommage en film qui s’ajoute à un autre rendu à Mouna Noureddine, le 5 juillet 2024, à l’occasion du soixantenaire du FIH.


«Deadline» de Hazem Fenira, «Tapages nocturnes des pensées»

Le spectateur est comme entraîné dans une spirale de peur, d’hésitation, d’espoir, de rêves et de cauchemars éveillés. Le court métrage de Hazem Fenira «Deadline» filme un dialogue entre deux versions de lui-même… qui s’entrechoquent et s’échangent autour de l’avenir. Un avenir post-inscription à cette résidence artistique «Des écrans de Hammamet». Tantôt il se voit propulsé, de renommée internationale, ayant une notoriété fulgurante, tantôt il se voit perdu, paumé, noyé dans un avenir sombre… livré à lui-même et n’arrivant pas à faire décoller sa carrière. Tel un diable et un ange, l’heure est aux doutes ! Une discussion qu’on a voulue plus développée et plus lente entre son soi et son alter–ego malveillant. Sa participation au «Mobile Movie» en dit long sur sa décision finale prise.


«Broova» de Youssef ben Said, «Un amour imaginaire ?»

Gros plan sur le visage admiratif d’un certain Youssef, qui n’a d’yeux que pour l’artiste-chorégraphe qui performe au théâtre. Youssef travaille dans la buvette, quand son regard se pose sur sa dulcinée rêvée, adulée en secret et qu’il souhaite approcher. Commence, alors, une poursuite faite en douceur avec toute la bienveillance du monde, afin qu’il puisse l’aborder. Il la regarde répéter dans une salle de cinéma, traverse les jardins de «Dar Sebastian»… Jusqu’au coup de théâtre qu’il vit sur la plage de Hammamet. Quelques minutes de cet amour imaginaire et adolescent agissent comme un ascenseur émotionnel. Un film court et sensible, bercé par une musique touchante.


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«A suivre…» de Farés Lafif, «Prémices d’un docufiction»

Tout un univers sépare le travail administratif et la passion dévorante pour le théâtre… Pourtant, Jamila Chihi, artiste comédienne et fonctionnaire, jongle entre ces deux spécialités. Jamila passe son quotidien à gérer les plateaux de répétitions, les fonctionnaires, les artistes. Pendant les tournées ou les représentations, elle occupe les loges, s’imbibe de savoir, d’arts, de rencontres enrichissantes, s’imprègne aussi du stress des préparatifs, de l’état d’esprit des artistes mais aussi «des équipes de l’ombre». Sa mission consiste à ce que tout se déroule bien ! Dans ce film, Farés Lafif effectue avec son téléphone portable une plongée dans les préparatifs de la pièce de théâtre «L’albatros» de Chedli Arfaoui, lors d’une représentation au festival international de Hammamet. Une journée vécue dans et autour du théâtre de la ville, condensée sur grand écran, en 5 min… L’aboutissement de deux mois de travail dans le cadre des « Ecrans de Hammamet». Le court scénario de Farés Lafif reflète son quotidien, son vécu, ses propres émotions. «A suivre…» a sorti son jeune réalisateur et Jamila Chihi d’entre les murs de l’administration.


«Si Bastien» de Rayen Bedoui, «Discussion d’outre-tombe»

C’est l’histoire du gardien du temple historique de Sebastian… ce lieu, appelé couramment de nos jours «Dar Sebastian». Un gardien de nuit fait une rencontre improbable et surnaturelle avec le fantôme du feu bâtisseur du lieu. Ce dernier fait sa ronde en apparaissant, à l’occasion de son anniversaire, puis disparaît. Se créer alors une interaction des plus insolites entre le gardien, et cette présence de l’au-delà dans l’enceinte de la résidence. Le fantoche en profite pour exprimer sa déception et sa nostalgie quant à l’état des lieux de ce bijou historique et architectural. L’échange devient ludique puisqu’il rappelle l’histoire de la résidence «Dar Sebastian», ses coins et ses recoins. Filmé sur un ton léger et ayant un titre «Si Bastien», à connotation tunisienne, le court métrage passe pour un court hommage insolite à un lieu incontournable.


«Lumières invisibles» de Wiem Rebah, «Au-delà du visible»

Et pas n’importe lequel… il s’agit bien de la scène du théâtre mythique de Hammamet, qui fête ses 60 ans cette année, qui a connu pas moins de 58 éditions du festival et d’autres événements à n’en plus finir, organisés hors festival. La réalisatrice Wiem Rebah, dans son 2e film court, transmet au spectateur les lumières et les sons émanant de cet endroit. De cette scène qui vit au rythme des arts et de ses guerriers de l’ombre, citons techniciens, régisseurs, metteurs en scène, organisateurs, responsables coulisses, administrations… ces faiseurs de spectacles qu’on ne voit pas et sur qui repose le visible, l’artistique. Un film court, qui se laisse écouter et voir. Un film d’ambiance, sensoriel, qui prône le travail de fourmi élaboré «hors caméra» et qui tisse une atmosphère vraie, celle de «derrière la scène».


«Mon double» de Karama Sayadi, «Intergénérationnel»

Une plongée autrement dans les coulisses des performances artistiques. A travers «Mon double » signé Karam Sayadi, le spectateur fait la connaissance de Ferid, danseur – chorégraphe, imprégné par le savoir et la carrière florissante de sa grand-mère. Deux savoirs différents, deux époques à l’apogée, deux vécus sans doute contraires, mais les mêmes ressentis, sensations, réflexes minimes, dans cette même loge, avec son lot de préparatifs. L’existence d’une grande artiste qui fait écho chez son petit-fils. Une parenthèse filmée, celle de l’avant-spectacle, et la rencontre avant le public. Dans les rôles principaux de «Mon double», «Achraf ben Hadj M’barek» et «Nawel Skandrani».


«Le SI, magique d’être» d’Imène Ghazouani, «Quête de soi»

Il s’agit d’une quête nocturne de soi et d’un personnage… effectuée d’une manière effrénée. Dissimulé (e) et se faisant discrèt (e), tel un cambrioleur, elle/il escalade les murs, traverse buissons et arbres, évite de se faire repérer, esquive toutes les attentions et les discussions, jusqu’à atteindre l’amphithéâtre en plein air. Son identité, une fois dévoilée, commence alors un monologue autour du théâtre, plus particulièrement en évoquant le mythe de Médée. Hommage filmé face caméraportable, à des personnages incontournables et des interprétations marquantes qui ont dû enrichir auparavant l’histoire du festival international de Hammamet, des décennies durant.


«Les écrans de Hammamet» dans sa première édition se poursuit jusqu’au 11 août. Toute la résidence artistique s’est faite sous la supervision du réalisateur Brahim Letaief. Khedija Lemkacher et Hamza Ouni, deux scénaristes et réalisateurs, ont mené à bout la phase «écriture des scénarios» avec les 8 participants. Les projections des courts métrages en compétition se font dans l’enceinte du théâtre plein air de la ville. Le public peut noter les films après chaque projection pour contribuer à élire le gagnant. Les séances de nuit commencent par la projection des courts inédits, suivis d’un ancien court et d’un ancien long métrage tunisiens. Un débat clôture les soirées cinéma des «écrans» qui rappellent une ancienne tradition estivale à Hammamet, celle de visionner des films à la belle étoile. Les festivaliers ont pu assister à des conférences et débats variés chaque matin à partir de 11h00 en présence de différents réalisateurs et invités pour parler d’arts vidéo, de comment réaliser des films à petit budget, ou de rencontre autour du parcours de Salma Baccar ou de Moncef Dhouib. Les moments visuels forts restent sans doute les jeux de lumière, les jeux de réalité virtuelle la Ciné Box, avec un visionnage et des activités pour les enfants. «Frame», l’installation d’art visuelle collective à la maison Sebastian reste accessible au grand public chaque après-midi. Nous y reviendrons !

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