Articles

Alia Bournaz Baccar, auteure de « Sophonisbe, princesse carthaginoise et reine de Numidie » : Résurrection d’une princesse
ENTRETIENS12 / 10 / 2016

Alia Bournaz Baccar, auteure de « Sophonisbe, princesse carthaginoise et reine de Numidie » : Résurrection d’une princesse


Qui a déjà entendu parler de « Sophonisbe » ? Un prénom à la connotation historique Intriguant, délicieusement mystérieux, générateur d’interrogations diverses ? A la lecture du titre entier du dernier ouvrage d’Alia Bournaz Baccar « Sophonisbe, princesse carthaginoise et reine de Numidie », le mystère se dissipe doucement mais surement. Grâce à la chercheure, doctorante, universitaire et écrivaine, déjà auteure d’ouvrages baptisés « Ulysse et les délices de Djerba » et « Elissa Didon reine de Carthage » (entre autres), Alia Bournaz Baccar s’est donnée comme objectif d’éclairer un lectorat tout public en le replongeant dans les annales de l’histoire de Carthage. Cet ouvrage, publié chez Arabesque est une reconstruction historique des plus ludiques, l’histoire de « Sophonisbe » a été soigneusement esquissée, son vécu finement ré – illustré en collaboration Zohra Larguèche, diplômée des Beaux Arts de Tunis, enseignante et aquarelliste, et le personnage féminin historique, ressuscité. L’extraire des oubliettes, tel était l’objectif phare d’Alia. Un défi hautement relevé, après des années de lutte acharnée. Entretien.


15181414_10210918504776669_443748501756366044_n.jpg

Pourquoi écrire sur "Sophonisbe" aujourd’hui et en quoi cette princesse est-elle actuelle ?


L’idée d’écrire sur Sophonisbe m’est venue lorsque j’ai constaté la chape de plomb qui recouvre cette princesse carthaginoise ! C’est une héroïne historique qui est très peu connue dans son propre pays. En dehors des spécialistes, son nom est toujours suivi par un silence interrogatif lorsque vous le prononcez. En Tunisie seuls quelques rares ouvrages lui ont été dédiés alors qu’à l’étranger elle a inspiré autant de romanciers, dramaturges, poètes que d’artistes peintres, musiciens, cinéastes….J’ai pensé qu’aujourd’hui où je sens que notre jeunesse est désorientée, il serait bon de lui rappeler ses racines et les héros qui ont marqué l’Histoire plurielle de son pays. C’est un encrage, à mon avis des plus bénéfiques pour notre jeunesse, d’autant plus qu’on retrouve en cette princesse les critères de la tunisianité, à savoir le lien avec un passé grandiose, l’amour de la patrie, le courage, le don de soi, le sens de l’éthique et de l’honneur la finesse d’esprit, bref ce qui fait la spécificité de la personnalité tunisien, du moins en partie.


Dans chacun de vos livres, la femme tunisienne semble avoir un rôle majeur dans l'histoire de ce pays ...


Oui, en effet, c’est un sujet qui me tient à cœur et une étude complète sur les Femmes illustres de Tunisie de l’Antiquité à l’Epoque contemporaine doit être envisagée. Nos héroïnes sont les grandes oubliées de notre Histoire. De nos jours, on parle peu de celles qui appartiennent à un passé lointain ou même proche et qui se sont estompées dans la mémoire collective. Pourtant, ces femmes ont marqué leur époque soit en prenant les armes, soit en léguant une œuvre. Bien d’autres aussi sont restées dans l’ombre. C’est le cas des militantes qui ont sacrifié leur vie pour libérer leur pays ou encore des pionnières dans le domaine médical et pédagogique. Leurs faits et gestes n’ont jamais été intégrés dans les cours scolaires d’Histoire. Ils peuvent servir de modèles bénéfiques et donner à réfléchir à notre jeunesse qui gagnera plus d’assurance et d’espoir. Il y a vraiment l’embarras du choix et de la matière pour réaliser des volumes. J’ai modestement contribué, pour ma part à cet aspect en publiant sur Elissa-Didon, Sophonisbe, Maherzia Bornaz, Zobeïda Amira, Mongia Mabrouk, pionnières dans l’éducation et l’émancipation de la Tunisienne, sur la militante Rafiâ Bornaz, j’ai préfacé le livre de Najet Fakhfakh « La Liberté en héritage »… mais il reste encore tant à faire !


D'aucun pense que malgré le rôle très important que les figures féminines emblématiques ont joué dans l'histoire, la femme tunisienne actuelle reste toujours fragile face aux différents courants qui risquent de lui faire perdre tous ses acquis. Qu'en pensez- vous ?


Oui, c’est vrai, c’est un constat qu’il faut hélas avouer. Je suis préoccupée et inquiète face à la maltraitance de la gente féminine au lendemain de notre révolution. En ce début du XXI° siècle où la technologie de pointe progresse à une allure vertigineuse, à l’ère des sciences où les découvertes se bousculent pour le bien de l’humanité, la matière grise de ces messieurs est phagocytée par une idée fixe : ramenez la femme à sa condition moyenâgeuse ! Toute leur énergie est bloquée pour pourchasser la femme qui est menacée, prise à partie, oppressée, brimée. Bref, nous assistons à la mise à mort de la femme libre, cultivée, équilibrée, épanouie. Elle dérange et on fait tout pour lui couper ses ailes. Même la petite fille dérange. Pourquoi lui vole-t-on son enfance à l’heure où elle doit sauter à la corde et jouer à la poupée ? On exploite sa naïveté et on l’affuble du hijjab. C’est une véritable gangrène qui ronge le pays. Mais j’ai confiance en la Tunisienne. Depuis l’antiquité la plus lointaine, combative, elle a toujours montré ses multiples capacités et marqué l’Histoire de la Tunisie. Pour obtenir l’indépendance de leur pays, les femmes ont sacrifié leur vie et leur famille tout en restant dans l’ombre. Elles se sont ensuite investies dans le combat pour leur émancipation et ont su prouver leurs compétences, leur sérieux, leur sagesse, leur sens des responsabilités et des gestions, tout en ne négligeant pas leurs rôles de mères et d’épouses. Elles ont porté haut le nom de leur pays dans tous les domaines : savoir, arts et culture, sports… En ces jours où on veut l’ensevelir sous un linceul noir, la fresque féminine qu’offre la Tunisie devrait être enseignée dans les manuels scolaires pour que nul n’oublie. D’où ma modeste contribution par ce conte sur Sophonisbe.


Quelle place peut avoir le conte aujourd’hui auprès de nos jeunes confrontés aux diktats de l'image et de l'internet ?


Là aussi, il faut reconnaître le recul de la lecture face à la recrudescence de l’audiovisuel, comme d’ailleurs partout dans le monde. C’est une forme d’éducation qui inculquerait à son enfant l’amour de la lecture, en créant des moments de complicités où l’un des parents lui lirait des passages chaque soir avant de dormir ou à d’autres moments perdus. La lecture deviendrait alors une habitude incontournable et une évasion. Les contes doivent plaire et instruire car ils enrichissent les connaissances du jeune lecteur en lui faisant découvrir d’autres cieux, d’autres époques, d’autres héros, en élargissant ses horizons et en développant ses facultés. C’est du moins ce que je recherche en écrivant mes contes pour la jeunesse.


Les deux volets précédents « Ulysse et les délices de Djerba » et « Elissa Didon reine de Carthage », vulgarisent une Tunisie antique pour les jeunes. Reconstruire tout un univers historique ne doit pas être de tout repos ...


Je me suis mise à vulgariser ces deux contes qui ont eu un succès fulgurant, avant de me focaliser sur « Sophonisbe ». Et ces textes me demandent énormément de travail : une recherche très approfondie et de la documentation acharnée. Quand on se fixe un but de faire revivre des personnages historiques qui ont réellement existé, on se doit d’être très pointu sur les informations récoltées qu’on s’apprête à ré-véhiculer. On se déplace sur des sites historiques, on se renseigne sur l’architecture d’antan… Ce genre de « contes », raconte des personnages et une époque historique très lointaine, qu’on essaye de vulgariser et d’interpréter. Et c’est là ou réside la difficulté. Il ne s’agit pas d’un roman ou on laisse notre imaginaire planer. Quand on a une espèce de « balises », qui sont l’histoire l’époque les personnages, il faut que ça soit net et vrai. Je tiens absolument à ce que les jeunes, s’instruisent sur leur passé. Qu’on les éclaire sur 3000 ans d’histoire !


D’où l’emploi de ces illustrations attrayantes de Zohra Larguèche pour une immersion assurée …


Bien sur ! Tout comme mes autres livres, je tenais à ce que ça soit illustré. Et pour se faire, j’avais absolument envie de faire participer les jeunes. D’où ma rencontre initialement, avec trois étudiants à la faculté des arts que j’ai chargé de me fournir les illustrations historique, mais peine perdue, ils n’ont rien pu faire. Ils n’ont cessé d’esquisser des illustrations qui n’ont rien à avoir avec l’antiquité. Leur travail a montré, hélas, que de nos jours, la jeunesse d’aujourd’hui souffre d’une carence culturelle très profonde. Finalement, je me suis tourné vers Zohra Larguèche, artiste peintre confirmée de ma génération et également enseignante, qui s’est chargée de tout faire au bout d’un mois. Mon éditeur, qui prend en compte l’avis de l’auteur, a tout finalisé après et le résultat est à la hauteur de mes attentes et devrait plaire.



Alia Bournaz Baccar, auteure de « Sophonisbe, princesse carthaginoise et reine de Numidie » : Résurrection d’une princesse
50ème anniversaire du "Manifeste des onze" : Il était une fois les "Jeunes loups"
REPORTAGES11 / 21 / 2016

50ème anniversaire du "Manifeste des onze" : Il était une fois les "Jeunes loups"

Lors d'une rencontre dans le cadre des JTC, ce sont des professionnels qui ont parlé de la création de ce manifeste qui a changé le visage du théâtre tunisien, cinquante ans plus tôt.


C’est dans l’enceinte de la salle des conférences, très peu éclairée « Malawi », à l’Africa, que s’est tenue une rencontre - débat sur le « manifeste des onze » qui a fortement imprégné l’histoire du théâtre tunisien. Devant une vingtaine de participants, Lassaad Jammousi, président des Journées Théâtrales de Carthage, accompagné de Ali Louati et de Fradj Chouchane, porte – parole du groupe du Manifeste se sont, exprimés sur la création de ce traité, cinquante ans plutôt …


Outre l’aspect humain qui les a réunis, Chouchane, le plus âgé de cette poignée de jeunes tunisiens autrefois révolutionnaires, retrace au public le cheminement d’une révolution théâtrale historique, avec ses collègues, alors étudiants de la première école de théâtre dans le pays. Tous, y compris Moncef Souissi, décédé récemment, étaient influencés par l’école de Bertolt Brecht et celle de William Shakespeare. Ensemble, ils ont transgressé le théâtre classique de son maître Ali Ben Ayed, en 1966.


Avec l’implication des jeunes de sa génération et le soutien de certains sympathisants dont Tawfik Jebali, Abdelraouf Basti, Hichem Rostom, Naceur Chemam, Taoufik Guiga, ils ont lancé les prémices d’un théâtre nouveau, aux allures révolutionnaires.


Fradj Chouchane se remémore de l’époque et plus précisément, des circonstances ou a été conçu ce manifeste qui a vu le jour dans un contexte historique glissant durant lequel la Tunisie post-indépendante commençait à peine à s’ériger. Même à l'échelle du monde, l'époque était sans cesse en effervescence.


Toute la clique se réunissait, durant pas moins d’une semaine, à l’ancien café du « capitole » ou au « Studio 38 », situé en plein cœur de Tunis. Ils décortiquaient l’actualité nationale ou internationale, débattaient, s’échangeaient des idées à n’en plus finir. Rassemblés tous par un seul rêve : cette envie pressante de rénover. Une jeunesse qui aspirait à un changement radical grâce au 4ème art, celui de « la représentation » par excellence. Un miroir social qui permet à ses adeptes de mieux cerner les failles d’une société en construction.


Les signataires du « manifeste » étaient issus de la première école de théâtre dans le pays, le premier établissement qui enseignait toutes les ficelles du métier dont la réalisation, la direction d’acteur etc Ces adhérents et supporters étaient profondément alimentés par l’actualité mondiale : la guerre du Vietnam, le conflit israélo-palestinien, l’Apartheid, mai 68 et les révolutions estudiantines à caractère culturelle et artistique.


« On était forcément au courant de ce qui se passait au quatre coins du monde ». Se souvient Chouchane, qui, la même année, a fini par réadapter une célèbre pièce de théâtre "brechtienne" en langue arabe. Un travail honorable, qui leur a valu, à sa troupe et à lui, maintes récompenses, dont la principale était ce voyage d’une vie à Avignon, cette ville française qui abrite l’un des plus grands festivals de théâtre européens. Sur place, ont succédé des rencontres qui ont changé le cour de leur vie : George Wilson, Roger Planchon, Jean Vilar, Boris Béjart, entre autres.


Fortement secoués après cette virée, une révolution culturelle devait absolument remédier à un théâtre tunisien précaire, fortement sclérosé par l’école archaïque de Ben Ayed, qui prônait des valeurs bourgeoises et été considérée comme « élitiste », d’où ce différend d’envergure qui l’a opposé aux « jeunes loups ».


Il n’y avait plus de doute, la révolution était en marche et s’apprêtait à permettre « au théâtre de l’heure » d’émerger, composé de 30 adhérents, chaperonnés par Samir Ayedi, qui ne faisait pas parti des « Onze ». Le manifeste commençait par et « si nous parlions théâtre, et si nous faisions du théâtre… » ; Une incitation directe à un dynamisme inédit.


Une page nouvelle commençait alors dans l’histoire du théâtre tunisien… Ces « Grands papas » étaient porteurs d’un changement, d’un souffle nouveau, qui aurait très bien pu aboutir à une révolution culturelle plus approfondie.



50ème anniversaire du "Manifeste des onze" : Il était une fois les "Jeunes loups"
Conférence de Dr Essam heggy (NASA) : La voie lactée contiendrait d'autres formes de vie
REPORTAGES11 / 12 / 2016

Conférence de Dr Essam heggy (NASA) : La voie lactée contiendrait d'autres formes de vie

La cité des sciences de Tunis a consacrée toute une matinée à une thématique, celle de « l’exploration de l’eau », pas seulement sur la planète terre, mais également dans le système solaire. Les planètes avoisinantes regorgeraient de mystères qui tardent à faire surface, mais les recherches effrénées, effectuées par l’Homme se précisent ; les scientifiques sont déterminés à déceler toute forme de vie extraterrestre en commençant par mettre au point la science, la recherche et les technologies modernes les plus développées au service de l’exploitation de l’espace.

A l’aube du 21ème siècle, cette recherche de l’eau, forcément fructueuse, rythme le quotidien professionnel des spécialistes dans le domaine. Parmi eux, Dr Essam Heggy, invité d’honneur d’une conférence qu’il a dirigé devant un parterre d’étudiants à l’auditorium de la cité. Cet astrophysicien égyptien compte, de nos jours, parmi les chercheurs les plus compétents de sa génération ; il est Co-investigateur au laboratoire de production jet de la NASA, spécialisé dans la géophysique planétaire et spatiale et a récemment participé à la mission ROSETTA, qui s’est achevée le 30 septembre 2016.

Cette conférence d’envergure a permis aux invités de saisir l’importance de l’eau, l’essence même de la vie sur la planète bleue. Saisir cette matière ici-bas permettrait de mieux cerner l’éventualité d’arriver un jour à découvrir concrètement une forme de vie ailleurs. La conférence a comme objectif aussi d’éclairer davantage les invités présents sur l’issue de cette évolution climatique rapide qu’est entrain de connaître la Terre actuellement. Une grande partie des recherches pertinentes de Dr Heggy révèlent si les éléments, liés à la subsistance de l’eau sur la Terre existent aussi sur d’autres planètes, permettant ainsi à la vie d’émerger, sur cette voie lactée, qui tarde à révéler ses secrets.

Dr Essam Heggy a mis l’accent, peu avant son intervention, sur l’importance de cette expérience humaine acquise au fur à mesure de ses recherches. D’après lui : « l’homme, s’il est déterminé à découvrir le monde, ou l’espace temps qui l’entoure, ira loin dans ses recherches. Il faut affiner ce flair pour la science et étancher sans cesse sa soif de savoir pour un développement meilleur et durable. Plus rien ne peut l’arrêter s’il aime ce qu’il fait et s’il nourrit d’une manière continue ses centres d’intérêt. Ceci concerne n’importe quel domaine du savoir, pas uniquement les sciences physiques. »

Essam Heggy s’est exprimé aussi sur l’état du monde arabe qui hiberne face à l’occident. Un monde rongée, depuis des siècles, par une carence voire une paresse intellectuelle. Il ajoute : « Le monde arabe stagne, c’est vrai! mais ce dont il a besoin c’est qu’on l’encadre. Et pour y arriver, il faut impérativement remédier au domaine du savoir et œuvrer pour la réforme de l’enseignement supérieur. Une révolte culturelle et intellectuelle provoquerait l’éveil du monde arabe. ». La Tunisie, pour lui, est un pays qui a déjà une longueur d’avance dans le domaine de la recherche, structuré depuis les années 60 est qui demeure en effervescence : « C’es très important de s’y investir autant afin d’éviter aux jeunes les dérives de l’obscurantisme qui n’a jamais autant sillonné nos sociétés. » S’enrichir d’abord intellectuellement, permettra à la nation de sortir de sa torpeur.

D’autre part, ce chercheur s’est longtemps consacré à l’amélioration de l’enseignement supérieur et de la recherche en Egypte. Un engagement farouche, défini comme un besoin élémentaire et fondamental qu’il faut fournir aux générations actuelles, témoins d'un changement radical en cours, depuis le début du printemps Arabe. Heggy a validé son doctorat en astronomie et en science planétaire en 2002 avec les honneurs à l'Université Paris VI en France. Ses principaux intérêts scientifiques en géophysique planétaire ciblent principalement Mars, la Lune et les satellites glacés.


Conférence de Dr Essam heggy (NASA) : La voie lactée contiendrait d'autres formes de vie
Facebook
Twitter
Instagram
LinkedIn
haithemhaouel221@gmail.com