
«Nmout Alik» est le dernier spectacle de Lamine Nahdi, adapté et mis en scène par Moncef Dhouib. Une comédie noire sur scène présentée face à un public large : à travers ce spectacle théâtral, le duo tourne en dérision une Tunisie profondément affectée par les difficultés socio-économiques et politiques post-révolutionnaires. Truffée d’humour noir, «Nmout Alik» entame actuellement une tournée hors Tunis.
«Nmout Alik», votre dernier spectacle en date, adapté et mis en scène par Moncef Dhouib, est en route pour Sfax, pour sa première représentation en dehors de Tunis…
En effet, nous entamons les représentations en dehors de la capitale. Après les premières représentations à Tunis, nous partons à la conquête du public ailleurs, dans des conditions sanitaires difficiles liées à la propagation du covid-19. Les spectateurs seront présents et tiennent à soutenir le spectacle. Par «public», je veux dire le grand public dans son sens le plus large dont la réaction a été formidable. Les spectateurs sont de tout âge. Même notre élite nationale, qui se fait discrète ces derniers temps, est venue voir le spectacle. Des noms célèbres ont répondu présents et cela ne peut que nous ravir. Des personnalités du théâtre qui donnent leurs avis, qui en discutent, qui échangent autour du travail, c’est important ! Cet intérêt fait réellement plaisir. Espérons que le spectacle pourra tourner convenablement en pleine 5e vague.
Comment se sont passées ces retrouvailles avec Moncef Dhouib ?
Moncef Dhouib et moi, nous nous connaissons très bien depuis les années 70. Il y a une très forte alchimie au travail entre nous. On se comprend, on est compatibles. C’est une relation qui ne date pas d’hier. On sait où on va. «Nmout Alik» nous a pris deux ans de travail, tout de même. Sa première était attendue à Carthage l’année dernière avant l’annulation de l’édition à cause de la pandémie. On l’a finalement présentée au Théâtre municipal. D’une durée d’1h40, le public voulait en voir quand même davantage. Le public l’a vue de bout en bout et en voulait même beaucoup plus.
«Nmout Alik» est une adaptation du «Le suicidé», une œuvre littéraire russe de Nikolai Erdman. Pourquoi ce choix précisément ?
Moncef Dhouib est plus apte à répondre à cette question. Son style d’écriture est très présent dans ce travail : les réactions, les opinions, les tournures… Depuis «El Makki we Zakkia», «El Karrita», on a travaillé même ensemble au cinéma et sur plusieurs autres projets. L’écriture de «Nmout Alik» m’a été proposée, il m’avait mis dans le bain, dans le contexte : le texte m’a séduit immédiatement par la construction des personnages, les rebondissements. Dans le théâtre, quand le travail est élaboré étroitement entre comédien et metteur en scène, le résultat final est sans doute impactant et de qualité. Moncef Dhouib a son empreinte et il est très ouvert à l’échange.
La Tunisie actuelle est une inépuisable source d’inspiration. Elle peut être source de comédie humaine, noire, et forcément drôle. Qu’en pensez-vous ?
Pas uniquement la Tunisie, mais le monde entier. L’art comique est parti avec les légendes d’antan. Le grand problème du théâtre de nos jours se trouve au niveau de l’écriture. L’écriture est la base, et pour réussir une bonne comédie, il faut une écriture de qualité. Notre théâtre tunisien regorge de talents, âgés, et appartenant à la nouvelle génération, hommes ou femmes talentueux. On ne manque de rien pour faire du bon théâtre : les techniciens, les anciens du secteur… mais l’écriture de qualité au théâtre manque à l’appel. Il faut un bon texte surtout pour aboutir à une bonne comédie. Ce n’est pas la matière qui manque. Il y a toujours beaucoup à traiter. Tisser du comique, c’est un don. Celui qui en fait doit être intégré dans sa société, dans son milieu, et doit être connaisseur, curieux. Un bon acteur est celui qui sait s’imposer et conquérir son public. Il faut s’imprégner, se cultiver : les sources de connaissances sont de nos jours inépuisables.
La comédie, selon vous, touche-t-elle plus que la tragédie ?
Absolument. Surtout l’humour noir, grinçant et la comédie noire. «Apprendre en jouant, en s’amusant, en plaisantant», c’est nécessaire. Passer du comique au tragique est tout aussi important, et il faut savoir bien le faire.
«Nmout Alik» est donc une comédie noire ?
Clairement. Même très noire. Les spectateurs étaient tiraillés entre le comique et le tragique, ils étaient sur leurs gardes, au début, et étaient à la recherche de rebondissements. Je pense qu’ils ont été servis. Leur retour était extraordinaire. Il s’agit, en plus, d’un public averti. L’accueil était à la hauteur. Une tournée nationale et internationale promet de se poursuivre jusqu’à fin avril. Canada, Paris, Belgique et festivals nationaux et internationaux sont au programme.

C’est dans son jardin que le Goethe-Institut de Tunis accueille, du 26 septembre au 1er octobre 2022, un public, attiré par des sonorités recherchées, venu vivre une exposition sonore itinérante, comme on en voit rarement. Dans la continuité de son itinéraire qui se déroule en Afrique du Nord, du Nord-Est et en Asie occidentale, «Mirath : Music» est accessible, cette semaine, au public tunisien.
L’itinérance rime avec immobilité, et cette spécificité, «Mirath : Music» la tient de son passage au Soudan, à la Jordanie et en Allemagne. Place actuellement à la Tunisie. Le jardin du Goethe-Institut Tunis vivra, pendant 6 jours, aux rythmes de sonorités créées par 8 artistes, issus des régions citées. Ces mêmes musiciens sont imprégnés par différentes cultures, issues de divers milieux géographiques et ont un point commun central : le patrimoine culturel musical de leurs pays, qu’ils/ elles se sont permis de revisiter afin de réaliser cette exposition sonore. «Mirath : Music» ou «Patrimoine:musique» se réfère à des patrimoines musicaux diversifiés prônés grâce aux musiciens participants et au soutien des antennes du Goethe-Institut, de 7 pays: Palestine, Soudan, Algérie, Irak, Libye, Liban, Jordanie et Tunisie.
Des sonorités musicales émanent des coins du jardin, spécialement aménagé à l’occasion de cette exposition musicale. Cet accomplissement se repose sur une approche curatoriale expérimentale, propre à chaque musicien-participant. Individuellement, les 7 artistes ont puisé dans un patrimoine musical historique, issu de lieux et d’époques distinctes. La documentation riche, rédigée et affichée pour les visiteurs, permet d’en savoir davantage sur l’approche musicale de chaque musicien et musicienne, tout en écoutant leur musique.
L’approche et la ligne directrice de l’exposition ont été largement discutées et élaborées, en amont, par les musiciens-exposants dans le cadre d’un atelier en ligne d’une durée de 6 jours. Ils/elles sont parvenu(e)s à mettre en valeur, musicalement et individuellement, le patrimoine musical de chacune de leur région. Toutes et tous ont puisé dans des aspects qui leur sont propres et auxquels ils/elles sont attaché(e)s. Les musiciens ont su ainsi exploiter musicalement les contextes sociopolitiques dans lesquels ils vivent et présenté l’aboutissement de leur travail dans le cadre cette exposition sonore collective.
Au fil de la déambulation, tout en lisant et en écoutant leurs différentes pistes réalisées, des thématiques retentissent liées à la liberté, à la reconnaissance, à l’appartenance à une culture locale, aux combats sociétaux, et à cette volonté propre aux musiciens de préserver leur patrimoine culturel unique. L’Algérienne Amel Zen, la Kurde Hajar Zahawy, le Soudanais Mohamed Adam, Ghassen Sahhab et Mustafa Said de l’Egypte, la Tunisienne Rehab Hazgui, Zaid Hilal de Palestine et Yacoub Abou Ghosh de Jordanie ont conçu 14 pistes musicales spécialement pour «Mirath : Music» en maniant différents instruments musicaux propres à leurs régions. La documentation de l’exposition a été validée par l’artiste et éditeur Christina Hazboun. L’exposition sonore itinérante est accessible au public gratuitement de 14h00 à 20h00 dans le jardin du Goethe-Institut Tunis.

L’exode en masse de citoyens à travers le monde pour une Syrie islamique fantasmée a marqué la décennie précédente et a inspiré d’innombrables films et séries télé traitant de l’endoctrinement religieux de Daech. La Syrie du Calife est, depuis, presque dissoute, mais continue à alimenter quelques dernières sorties cinéma. «Rebel» d’Adil el Arbi et Bilall Fellah, en salle depuis le 31 août 2022, tire son épingle de cette thématique récurrente… ou peut-être pas assez !
Fellah et El Arbi, deux nouvelles coqueluches de la réalisation à Hollywood, traitent dans «Rebel» du terrorisme en tentant de le synthétiser. Pari risqué et relevé à coups d’effets spéciaux, d’acteurs remarquables, de bande sonore attrayante… Et de scénario peu original.
Après une succession de frasques et d’égarements à Molenbeek, en Belgique, Kamal coupe les liens avec son foyer (sa mère plus précisément) et part rejoindre un organisme humanitaire qui vient en aide aux victimes de la guerre en Syrie. Une fois sur terrain, le jeune homme se retrouve embourbé dans des actions terroristes, embarqué par un groupe armé affilié à Daech et bloqué à Raqqa. Parallèlement, son petit frère, resté en Belgique, se fait endoctriner par un groupe de fanatiques religieux, installé en Europe et qui finit par l’embarquer en Syrie. Leur maman, magistralement interprétée par Lubna Azabal, désemparée, part chercher son fils cadet dans une Syrie, déchiquetée par la guerre.
Les frères belges se sont fait une place rapidement dans la Mecque du cinéma mondial en réalisant «Bad Boys 3», «Miss Marvel» ou prochainement «Batgirl». A travers ce long-métrage, les frères se ressourcent et reviennent aux origines, en optant pour un drame, inspiré de faits vécus, ayant eu lieu dans leur pays d’origine, la Belgique. Ils décortiquent l’essence même de ce fléau, son emprise du corps et du mental des victimes, dans un Occident ciblé et peu immunisé de «l’Etat Islamique». Le film est fort d’une mise en scène attrayante et d’une direction d’acteurs maîtrisée : au fil de l’histoire, de nombreuses victimes sont disloqués par le terrorisme. Les ravages d’une idéologie meurtrière sont élégamment relatés, dans ce long-métrage qui parvient à allier langage corporel, danse, musique, arts et violences inouïes, causées par l’E.I.
Des scènes chorégraphiques et de chant ponctuent le film sur 2 heures 15 d’horreur, agissant ainsi comme des intermèdes qui laissent respirer le spectateur dans ce chaos narré… Ces mêmes intermèdes qui ennuient, donnant lieu à une production qui oscille, entre musique et drame sur grand écran : Un «Rebel», Ovni.
Ce spectacle sur grand écran reste esthétique certes, mais se noye dans une horreur redondante, vue et revue et qui reste peu en phase avec l’actualité mondiale. «Rebel» fait surgir des mots enfouis, des douleurs physiques et des blessures de l’âme. Des prouesses filmées font également l’éclat de «Rebel», à travers des plans –séquences de guerre, saisissants de terreur, sublimés d’affrontements, d’exécutions et de tueries. Une horreur esthétisée qui panse un scénario peu original. A l’affiche du film, Aboubakr Bensaihi, Lubna Azabal et Amir el Arbi. Le film est distribué par Pathé BC Afrique en Tunisie et en Afrique.

Hammamet est connue pour sa broderie. À l’occasion du mois du Patrimoine, la ville célèbre cet art et ses atours. Une broderie caractérisée par ses artisans et ses artisanes. Un art digne d’un patrimoine, hérité de mère en fille, d’une génération à une autre.
Ainsi, le Centre culturel international de Hammamet, la Maison de la Méditerranée pour la culture et les arts, en collaboration avec l’’Association « les ambassadrices de Hammamet » (Safirat), organise le 18 mai 2022 une journée à partir de 10h00 à Dar Sebastian pour célébrer les tenues et vêtements traditionnels puisés dans le patrimoine hammamettois avec la présentation des étapes de la confection de l’habit, du traçage du dessin, Rchima, à la broderie, Triza et enfin à la couture et Tahrij. Les artisanes auront l’occasion de parler de leur savoir-faire et de leur transmission. La clôture se fera par un défilé mettant en valeur les rituels du mariage traditionnel à Hammamet et les habits portés par la mariée. Les organisateurs de l’évènement étalent, dans l’annonce de l’initiative, les caractéristiques de cet habit.
La précision et le savoir-faire de ces femmes font leur réputation. Les broderies de Hammamet sont célébrées et évoquées dans les manuels de couture et racontent l’histoire de Hammamet, son passé, conservé jusqu’à nos jours. Les mamans veillent à transmettre à leurs filles cet art ancestral.
Une broderie qui reste toujours au goût du jour. La variété des tissus, laine, soie, coton, lin, velours, s’ajoute à la richesse des matériaux : fil d’or, fil d’argent plat, paillettes, cannetille, galons, boutons, broderie, dentelle mécanique ou faite à la main, rubans et rosaces font les ornements de cet habit local. Le traçage des dessins, la broderie et l’ornementation des cols, des bouts des manches et des bordures inférieures des habits, sont exécutés par la « rachama», la «tarraza» et la «harraja». Il suffit de se munir de quelques fils et d’une aiguille, et de faire preuve de créativité.
Hammamet est réputée par l’originalité et la diversité de ses costumes traditionnels, surtout féminins. Des costumes qui sont remarquablement bien conçus comme « Al Keswa Kebira », « La Jebba Matrouza » et qui reste la plus chère. « La Jebba Akri » avec une moitié rouge et l’autre noire est portée par les femmes de Hammamet pendant le deuxième jour du mariage. La mariée porte aussi une toque ronde toute dorée « Taaguiya » sur la tête et un foulard « Fouta Hrir » en soie pour ajuster la tunique au niveau de la taille. Le «kadroune» est un habit en laine à longues manches, porté surtout en hiver. « Al Kamis» et le « Seroual », sont tous deux confectionnés à partir d’un tissu blanc et brodé. La «souriya» ou «kmijja» est une chemise qui s’agrémente de broderies au fil d’or. La «farmela» est un gilet généralement brodé. Le «mérioul fadhila» est un tricot fait en fils de coton ou de soie. Le « Tigar » est porté par la mariée avec la coiffe locale. « Eckmak » est une chaussure brodée main, avec des fils de soie.
Les accessoires sont les compléments indispensables pour rehausser la beauté des costumes féminins à Hammamet. En plus des coiffes, richement décorées de broderie de soie, d’argent, de perles et des chaussures aux broderies adaptées, il y a les bijoux traditionnels qui persistent à travers les temps et les époques (romaine, byzantine, arabe, turque et andalouse) pour ajouter un peu plus d’éclat aux tenues et au charme de celles qui les portent et qui avaient pour noms « Skhabe » «khalkhal», «hjar», «Khajla» «tlila» et «jlaïet».
L’habit traditionnel de la femme hammamétoise est connu par son authenticité. Ces femmes hammamétoises sont les détentrices d’un savoir-faire traditionnel. Elles façonnent même la mémoire collective. Elles conservent, perpétuent et transmettent, aux jeunes générations, un patrimoine culturel et identitaire.
Ainsi, tout effort de sauvegarde de l’artisanat traditionnel doit tendre essentiellement non pas à préserver les objets artisanaux seulement, mais à soutenir les artisanes et les artisans, de les pousser à continuer à produire des réalisations de toutes sortes, de transmettre leurs compétences et leur savoir-faire aux autres et aux nouveaux apprentis.

Mettant en scène la survie de l’Homme face à l’acharnement d’une bête féroce, le long métrage de Baltasar Kormakur remplit sa mission de divertissement sur grand écran. Peut-être sa seule vocation !
Avec à l’affiche Idris Elba et à coup de phrases promotionnelles, le film fait échos au combat d’un père pour sauver sa famille. Dr Nate Daniels est père de deux filles. Il décide un jour de rejoindre un ami à la famille, Martin Battles, en Afrique du Sud, dans une zone sauvage et aride qui fait office de savane à lions. Ce dernier est éleveur et dompteur de lions : il observe leur survie en groupe dans leur environnement naturel et dénonce les agissements des braconniers. Martin est un anti-braconnier farouche luttant sans cesse contre la chasse de cette espèce menacée.
Le choix de cette destination reste peu anodin, puisque le docteur Daniels choisit cette destination en hommage à sa femme, décédée d’un cancer, et mère de ses deux filles. C’est, en effet, dans ce coin de l’Afrique du Sud qu’ils se sont connus. Elle en est même originaire. C’est aussi une tentative de réconciliation avec ses deux filles, très affectées par la perte de leur maman. Seulement, une fois sur place, les morts suspectes n’ont cessé de se décupler : villageois et chasseurs sont décimés par une bête sauvage qui rôde autour. Elle ne tardera pas à s’en prendre au petit groupe.
«Bête» ou «Beast» comme son nom l’indique se réfère à un lion, extrêmement sauvage. Sa barbarie est due à la violence des braconniers qui l’ont séparé de son groupe et l’ont pourchassé. Quiconque s’approche de son territoire est massacré. Sur 1h30, le film à suspense, concis mais prévisible, retient sans doute le spectateur jusqu’à la fin, mais sans grandes surprises. Une famille bloquée dans une voiture, face à une bête féroce : comment vont-ils s’en sortir ? L’interprétation d’Idris Elba reste convaincante, à la hauteur de son talent. Le film dénonce le comportement des braconniers, souvent pointés du doigt de nos jours : ces criminels organisés s’enrichissent à travers la chasse aux animaux, souvent menacés d’extinction et en font un trafic international. Ils nuisent à l’écosystème et représentent une menace sérieuse pour le règne animal.

Le film est fourré de clins d’œil à «Jurassik Park» de Steven Spielberg : le tee-shirt d’une des héroïnes, arboré, avec dessus «Jurassik Park», scènes de combat qui rappellent ceux des dinosaures mythiques de ce parc, scénario très inspiré de ce classique qui représente l’homme comme une menace pour l’équilibre animalier et scènes d’action et de poursuites étonnement similaires à ceux du parc : le réalisateur n’a pas manqué d’afficher son inspiration. «Beast» est distribué par Pathé PC Afrique et est à l’affiche actuellement dans toutes les salles de cinéma en Tunisie.

Des artistes multidisciplinaires s’unissent sur la scène de l’IFT, le temps d’une soirée, afin de présenter «Triangle». Une performance qui a pour vocation de mettre en dialogue de jeunes artistes issus de divers points géographiques. La compagnie Kif’Dance, cré ée par Meriem Bouajaja, danseuse chorégraphe, et son co-fondateur Mohamed Chniti, interprète chorégraphe, et directeur artistique de « Triangle ». Les deux sont à l’origine de ce moment performatif.
La nuit caniculaire du 8 septembre 2022 n’a pas dissuadé le public d’assister à ce rendez-vous scénique. «Triangle» unit deux pays, comme la Tunisie, Tunis/Kasserine et la France, Montpellier. «Triangle» abolit les frontières et se veut multidisciplinaire : il fusionne musique, danse et autres disciplines. Trois artistes se sont réunis spontanément et sont parvenus à créer un spectacle original. «Triangle» existe au moins en deux versions et puise sa force de la géographie : entre la Tunisie et l’international et entre différentes régions de la Tunisie.
Cerner la vision de la performance est essentiel afin de mieux la vivre. Anwer Rawefi, batteur professionnel, rejoint la scène aux côtés de Juliette Bouissou, danseuse professionnelle, et Meriem Bouajaja. Sur des airs de musique éclectique, recherchée, la scénographie d’Amine Boudrika est une invitation à la découverte. Une dualité s’est installée entre deux danseuses de différentes rives, nord et sud. «Triangle» est un moment de partage de talents, d’expériences, d’émotions sur scène. Batterie, percussions et danse ont fusionné, donnant lieu à un écho sonore et artistique distingué. Le point fort du spectacle est sa scénographie attractive, visuellement et musicalement. Le corps est au cœur du spectacle : voix et gestuelle sont ancrées dans une scénographie adaptée et évolutive.
Concrétisé par des artistes multidisciplinaires, «Triangle» est l’aboutissement d’un travail qui a eu lieu dans le cadre d’une résidence artistique d’ateliers, de cours et de recherche. Le spectacle programmé à l’Institut français de Tunisie signe le commencement de la rentrée culturelle, artistique, universitaire et scolaire de 2022.

L’association «Médias & Démocratie» a permis à un noyau de journalistes mauritaniens, algérien, tunisien et burkinabé de participer à une immersion de qualité dans la rédaction du journal La Marseillaise. Retour sur expérience !
La partie pratique d’un programme de formation, conçue pour des journalistes africains a débuté dans les locaux d’un journal historique. 9 journalistes participants —dont 6 Mauritaniens— se sont rendus à la rédaction de La Marseillaise.

Le président du journal, Léo Purguette, entouré de son équipe, les accueille dans une salle de conférences. En observateurs, ces derniers assistent à la réunion de rédaction, effectuent une visite des locaux et prennent connaissance du fonctionnement de la rédaction, ainsi que de son aspect historique. L’immersion d’une durée de deux jours a permis aux journalistes-invités de découvrir la structure d’une rédaction qui tient toujours à sa version papier, tout en accordant de l’importance à sa version web et en entretenant une visibilité en ligne pour ses lecteurs.

«Nous avons investi dans un nouveau site et dans une liseuse numérique qui nous a permis de réaliser de nouveaux abonnements 100% numériques. Nous croyons au “Bimédia”, à la complémentarité du web et du papier», commente Léo Purguette, président et directeur éditorial du journal La Marseillaise.
Les visiteurs ne peuvent rester indifférents face à la fresque du peintre marseillais Pierre Ambrogiani (1907-1985), spécialement offerte au journal. La pérennité de La Marseillaise est puisée dans son histoire : elle représente l’imprimerie de La Marseillaise et ses ouvriers du livre en plein travail.

Les rédactions, qui se succèdent, valorisent près de 8 décennies d’existence, notamment en conservant l’archivage. «Nous avons conservé nos archives depuis les débuts, y compris des archives du Petit Marseillais, le journal qui existait auparavant dans ce même bâtiment qui nous abrite. J’ai, par exemple, retrouvé un de ses suppléments féminins intitulé Eve et qui date de 1922. Un siècle !», cite Léo Purguette.
En 2022, garantir la survie d’un journal historique est le fruit d’un travail d’équipe laborieux, mené au quotidien par des journalistes, attachés à l’éthique du métier et à ses fondements. La Marseillaise continue d’exister à Marseille tout comme le quotidien La Presse de Tunisie, vieux de 86 ans. Les deux rédactions croient au renouvellement générationnel, point commun important. «Nous tentons de demeurer fidèles à l’esprit de la Résistance et à ceux qui nous ont précédés», conclut Léo Purguette au sujet de La Marseillaise.
*Article et immersion effectués dans le cadre d’une formation en journalisme organisée par «Médias & Démocratie»

Une rédaction qui en rappelle une autre : la nôtre au sein du journal tunisien La Presse. Réunions, coups de fil, mises au point avec les journalistes font le quotidien rythmé de La Marseillaise. Et puisque une immersion doit être vécue jusqu’au bout, nous nous sommes entretenus avec le président et directeur éditorial, Léo Purguette, qui nous en dit plus sur l’archivage, le mode de fonctionnement actuel du journal et de son histoire.
La parution de La Marseillaise c’est plus de 70 ans d’histoire. Ses journalistes sont au quotidien témoins de leur époque. Pouvez-vous revenir sur cette genèse exceptionnelle du journal ?
Oui et même presque 80 ans, puisque nous les aurons l’année prochaine ! La Marseillaise a été fondée dans la clandestinité pour résister à l’occupant nazi et à ses complices de Vichy. Le premier numéro, daté du 1er décembre 1943, a été tiré en secret à Aix-en-Provence dans l’imprimerie «Tournel», puis diffusé sous le manteau. Au total, une douzaine de numéros clandestins ont été publiés avant que les Résistants, qui ont fondé notre journal, ne s’emparent du siège du journal collaborationniste Le Petit Marseillais que nous occupons toujours aujourd’hui. Le premier numéro légal de La Marseillaise est daté du 24 août 1944, il est sorti pendant les combats pour la libération de Marseille.
L’immense tableau accroché dans votre rédaction est un clin d’œil historique. Quelle est son histoire ?
C’est une œuvre du peintre marseillais Pierre Ambrogiani (1907-1985), spécialement réalisée pour être offerte à notre journal. Elle représente l’imprimerie de La Marseillaise et ses ouvriers du livre en plein travail.
La Marseillaise a traversé des épreuves et fait face aux aléas de son époque. Etes-vous parvenu à contourner ces difficultés ?
Nous les avons toujours surmontées, parfois au prix de grands sacrifices. Lors de nos dernières difficultés, nous avons réussi à éviter les licenciements avec le soutien renouvelé de nos lecteurs. Mais notre liberté fait aussi notre fragilité. La bataille pour que La Marseillaise continue d’exister est quotidienne.
Tout un mur dans votre rédaction affiche de nombreuses lettres de soutien reçues de la part de vos lecteurs. Qu’avez-vous à leur dire ?
Je voudrais leur dire merci. Sans eux, nous ne sommes rien. La mobilisation de l’association des Amis de La Marseillaise à nos côtés est exemplaire, elle fait notre fierté.
De nos jours, on évoque souvent la «survie de la presse écrite» face aux progrès technologiques. Dans certains pays, ce rapport à la presse papier est en train de disparaître. La digitalisation de La Marseillaise est-elle envisageable ? Quel est le futur de sa version initiale ?
Nous avons investi pour un nouveau site et une liseuse numérique qui nous a permis de réaliser de nouveaux abonnements 100% numériques. Nous croyons au «bimédia», à la complémentarité du web et du papier.
L’équipe de rédaction actuelle de La Marseillaise est relativement jeune. Les rédactions précédentes sont-elles dans la transmission d’un certain savoir?
Nous avons, en effet, eu un renouvellement générationnel très important. Néanmoins, nous tentons de demeurer fidèles à l’esprit de la Résistance et à ceux qui nous ont précédés. Je pense aussi aux grands journalistes qui ont marqué notre histoire, à l’image de Jean-Claude Izzo, devenu écrivain à succès, ou de Pape Diouf, devenu président de l’OM.
Quelle place accordez-vous à l’archivage historique et à la documentation ?
Une place importante, nous avons conservé nos archives depuis le début et même des archives du Petit Marseillais. J’ai, par exemple, retrouvé un de ses suppléments féminins intitulé Eve et daté de 1922, vieux d’un siècle !
*Cet entretien a été réalisé dans le cadre d’une formation en journalisme organisée par «Médias & Démocratie»

Les projections cinéma estivales poursuivent leur route de ville en ville. «Manarat» prend place à Hammamet le temps de deux projections de films gratuites et ouvertes au grand public.
Deux films ont été projetés jeudi soir sur la plage de Hammamet, en face du lycée Mohamed Boudhina de la ville : le court métrage tunisien «Visa» de Brahim Letaief, suivi du film franco-libanais datant de 2020 «Sous le ciel d’Alice» de Chloé Mazlo. Face à un écran, installé à l’occasion, le public, composé d’enfants, de jeunes et de familles curieux, se rassemble en petites foulées, prêt à vivre l’expérience dans une ville qui voit défiler rarement des événements culturels en dehors de son festival d’été annuel.
Pour la plupart, peu connaisseurs des deux films, les spectateurs tiennent à vivre l’expérience sur la plage, à la belle étoile. En fin d’après-midi, l’évènement s’ouvre en musique. Une prestation remarquable suivie de l’intervention de Nidhal Chatta, président de «Manarat Mediterranean Film Festival», qui a rappelé les enjeux de cette troisième édition transitoire, «Celle qui augure un avenir meilleur pour le plus grand bonheur des cinéphiles, voulant voir et vivre le cinéma en plein air et dans différentes régions de la Tunisie», cite-t-il.
L’évènement s’est déroulé en présence de la ministre des Affaires culturelles, Mme Hayet Guettat Guermazi, et du directeur du Cnci, Khaled Al-Azeq. Jeunes bénévoles, photographes et journalistes ont été également présents.

«Visa» d’Ibrahim Letaief, réalisé en 2004 avec à l’affiche feu Lotfi Dziri, Jamel Madani et Jamila Chihi, traite du sujet épineux de l’immigration et du droit universel à la libre circulation sans visa, en référence à son titre. Dans ce film de 26 mn, les pays de l’espace Schengen décident, en effet, de promulguer une nouvelle loi relative à l’immigration. Il faut réussir la dictée de Pivot pour pouvoir obtenir un visa d’entrée en Europe. Rachid, candidat à l’immigration, doit subir ce test.
Le long métrage de Chloé Mazlo «Sous le ciel d’Alice», projeté juste après, traite aussi, mais différemment de la même thématique: de l’immigration sur fond de guerre civile et d’instabilité politique au Liban depuis les années 50 jusqu’aux années 70 et de ce semblant de paix précaire atteint. Cartoonesque et fantaisiste, le film traite avec grâce d’un sujet sensible. Dans les années 50, la jeune Alice quitte la Suisse pour le Liban, contrée ensoleillée et exubérante. Là-bas, elle a un coup de foudre pour Joseph, un astrophysicien malicieux qui rêve d’envoyer le premier Libanais dans l’espace. Alice trouve vite sa place dans la famille de ce dernier. Mais après quelques années de dolce vita, la guerre civile s’immisce dans leur paradis, lit-on dans son synopsis. Crises personnelle, familiale, identitaire, le film parvient au final à exprimer ce sentiment de malaise collectif, enduré par une nation en pleine tourmente.
Le film a pu retenir des spectateurs jusqu’au bout malgré le brouhaha des passants. La plupart se sont réconciliés avec une plage, qui a eu une vocation autre ce soir-là, celle de permettre à des projections d’avoir lieu. L’équipe de Manarat est passée par Bizerte la veille, avant de se poser à Hammamet, assurant ainsi ce volet du festival titré «Manarat de Cap en Cap» qui a pris fin hier 2 septembre.