«Abeille», le film court de Mouna Ben Hammed est un portrait filmé. Incisif et poignant, l’essai filmique est une tranche de vie : celle de Deborah Lindoume, femme subsaharienne d’origine congolaise vivant en Tunisie. Une vie, un cheminement difficile, et un accomplissement, partagé avec sincérité.
Le film s’ouvre sur le quotidien de Deborah Lindoume, mère battante, qui aspire à un quotidien meilleur. Deborah arrive en Tunisie, pense partir en Europe avant de, finalement, rester. Elle est maman de deux enfants. Surnommée l’ « Abeille » depuis qu’elle est gamine, elle évoque son parcours, et se livre dans des confidences personnelles. Elle brise l’intime et revient sur son enfance : elle explique pourquoi elle a changé de nom à l’âge de 8 ans, s’exprime sur le sens de son prénom «Deborah», qui signifie «Abeille» et revient sur les origines de ce surnom attrayant. «La vie en Tunisie est très difficile pour les Subsahariens, pour les Noirs. On ressent souvent qu’on n’est pas les bienvenus. On nous insulte, on nous lance des piques, on nous appelle autrement. En Tunisie, comme ailleurs, ce vécu reste difficile». Confie-t-elle. Il s’agit d’un racisme ordinaire, violent, commenté pendant ce court métrage de 7 min 27. Deb a expliqué vouloir partir en Europe clandestinement et s’est finalement désistée quand elle a su qu’elle était tombée enceinte de sa fille. Devenir mère l’a rendue encore plus forte, endurante. La jeune maman dit avoir une vie meilleure : elle partage ses ambitions, ses plans d’avenir, ses projets de vie.
Le film est pertinent et ne tombe pas dans le pathos : le spectateur se rapproche du personnage central, compatit, et en même temps, se sent admiratif de son parcours. Son témoignage est vu et écouté de bout en bout et s’achève sur une note positive et optimiste. «Abeille» se clôt sur des images de ses enfants, des photos de famille et des souhaits à concrétiser. Le film est produit par l’ONU Migration / Pontes. Il est scénarisé et réalisé par Mouna Ben Hammed, dans le cadre de la campagne «Esshih». Mouna est jeune réalisatrice et artiste visuelle.
«Les jardins des secrets», titre intrigant pour une pièce de théâtre marocaine signée Mohamed El Hor. Elle a été présentée lors de cette 23e édition des Journées théâtrales de Carthage au public. D’une durée de 80 mn, la représentation était juste une occasion de découvrir un théâtre, qui nous vient du Maroc… faute d’intrigue saisissante.
Scénographie en place, voix off masculine qui accompagne le public et présence saisissante des trois interprètes… autant de composantes qui interpellent sur scène. Elles sont annonciatrices d’une histoire qu’on sent venir, mais qui n’arrivera pas comme souhaité. «Les jardins des secrets» rassemble pourtant différents ingrédients, nécessaires à la narration d’une tragédie théâtrale.
L’homme, figure paternelle, mari, mélancolique, effacé, sonne le glas d’un conflit familial. Il traîne une vie qui n’est pas la sienne, a épousé, «dans le respect» des traditions, une femme qu’il n’a jamais aimée. Leur union erronée est issue probablement d’un arrangement familial aux répercussions néfastes. L’épouse est fille de fortunés. Dépressive et malheureuse, n’ayant jamais aimé son époux, elle finit par entretenir une liaison avec un amant, aussitôt découverte. Leur vie de couple se disloque, devient un enfer et impacte la vie de leur fille unique. Cette dernière a suivi le mauvais exemple de ses parents en épousant un mari qu’elle n’a jamais aimé, et en se pliant à son tour aux traditions étouffantes. La jeune fille fuit ce mari la nuit de ses noces, et meurt dans un accident de voiture. Une mort qui hantera longtemps ses parents.
«Les jardins des secrets» est composée de plusieurs chapitres, aux différents titres, affichés en arabe, pendant la représentation. Tragique, la pièce, aux événements saccadés, raconte la détresse de cette famille, vivant au bord de l’abîme, dans un dialecte marocain peu saisissable, sans surtitrage. Le rythme lent et long, les émotions étirées sur scène dans d’interminables répliques, le ton monotone en voix off et l’intrigue pesante brouillent le spectateur. Ce dernier perd le fil et se perd dans des événements éclatés, des discours alertes, des lectures, des monologues ou dans différents échanges.
Cette création théâtrale, à la configuration classique, raconte le mal-être de l’humain et traduit sa fragilité, sur fond de tragédie familiale, ponctuée de quelques définitions psychologiques ou philosophiques : complexe d’Electre, Freud, Sartre… La pièce crie, nonchalamment, une existence vaine : celle d’un être humain qui s’interroge sur «Sa raison d’être», face aux épreuves. La pièce crie de nombreux vides existentiels et sombre totalement à son tour. A l’affiche de la création, Jalila Talemsi, Hager El Hamidi et Yassine Ahajjam.
Produit phare typiquement tunisien, connu dans le monde entier, l’harissa fait sensation en l’intégrant dans le patrimoine immatériel de l’Humanité. Piquante et relevée, elle tire son origine des piments séchés au soleil. 100% tunisienne, son succès n’a cessé de retentir à travers l’histoire, celle de la Tunisie, et ne passe sûrement pas inaperçue dans différents plats et recettes.
Le 1er décembre 2022 est désormais une date historique : l’Unesco a, en effet, fait honneur à l’Harissa en l’inscrivant dans son patrimoine immatériel de l’Humanité. Une consécration souhaitée depuis longtemps, et désormais assouvie. « L’harissa, savoirs, savoir-faire et pratiques culinaires, sociales et millénaires », cite le comité à la tête du patrimoine immatériel de l’Humanité lors de l’annonce de cette nouvelle. Ce même comité valorise des us, coutumes, et des pratiques ancestrales uniques, à travers toutes les sociétés du monde, bien plus que les produits matériaux. La fameuse harissa conserve sa saveur unique grâce à l’huile d’olive et possède un goût meilleur grâce aux épices 100% locales et à ses piments séchées au soleil, particulièrement piquants.
Ce produit culinaire inestimable pour la Tunisie peut s’inviter dans de nombreux plats tunisiens : elle fait le bonheur des invités de la Tunisie ayant une connaissance culinaire autre, et est utilisée par des restaurateurs et chefs cuisiniers. Ce condiment s’exporte facilement et depuis longtemps à travers le monde et est considéré comme ingrédient, souvent incontournable. Sa saveur est unique et est représentative de l’identité d’un pays. L’harissa raconte un patrimoine culinaire national. Des villes, connues en Tunisie pour leur récolte des piments, la produisent, en lui insufflant un goût différent, propre à chaque région. Le Cap Bon, ses petites villes, et sa grande ville Nabeul sont connus pour leur harissa prisée par les touristes et les Tunisiens eux-mêmes.
Un dossier de candidature bien fourni, présenté auprès de l‘Unesco, a valorisé ce produit national. Il cite son importance dans la cuisine tunisienne courante, le plus souvent préparée par des femmes. L’harissa rime avec convivialité, célébrations, et entretient l’esprit communautaire.
Son histoire remonterait au XVIIe siècle. C’est à ce moment-là que l’exploitation du piment a commencé à s’ancrer en Tunisie jusqu’à sa déclinaison en purée piquante. L’appellation même de l’harissa provient du verbe arabe «harrasa» qui veut dire broyer ou écraser.
La liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité compte actuellement plus de 530 éléments inscrits, dont 72 qui restent à sauvegarder d’urgence, selon l’AFP. Adoptée en octobre 2003 et ratifiée par 180 pays, la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel promeut la sauvegarde des connaissances et savoir-faire nécessaires à l’artisanat traditionnel, et les pratiques culturelles transmises de génération en génération, comme les traditions orales, les arts du spectacle, les pratiques sociales, rituels et événements festifs, sans oublier les connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers. Cet ingrédient est à consommer avec modération, trop de piquant tue le goût et peut avoir un mauvais effet sur la digestion. Il existerait même une Harissa sucrée, typiquement tunisienne aussi, mais ça, c’est une autre histoire…
«Théâtre de la liberté», titre attrayant d’une section maintenue dans le cadre des Journées théâtrales de Carthage, et qui fait écho à cette soif de liberté, ressentie par les détenus. En attendant leur liberté, qu’ils vivront au-delà des murs de la prison, ils entretiennent une passion pour les arts scéniques, spécialement pour le théâtre et nous le font savoir durant cette 23e édition.
«La sagesse d’un fou», pièce de théâtre, conçue entre les murs de la prison de «Borj El Amri», est un exemple de réalisation scénique, menée à bout par 6 jeunes détenus, la plupart trentenaires. Cinémadart est le lieu consacré aux pièces de théâtre signées par des prisonniers, femmes et hommes, issus de nombreuses prisons tunisiennes. La section se déroule en collaboration avec «le Comité général des prisons et de la rééducation». De différents établissements pénitentiaires, les prisonnières et prisonniers affluent, escortés par des agents de l’ordre. Pas moins de deux représentations par jour élaborées, sont présentées. Ambiance, qui allie curiosité, découverte et sympathie/empathie ressentie pour les interprètes. Ces derniers, pour la plupart amateurs, insufflent une dose d’émotion, à travers leurs textes, leur mise en scène, les dialogues et une certaine complicité.
Le théâtre affranchit des conditions de détention. Tout le travail scénique se fait en groupe : de la mise en scène, à l’écriture, au passage sur scène. «La sagesse d’un fou», mise en scène par le duo Hassen Ayachi et Mohamed Ali Jaouadi, le reflète bien : scène d’ouverture qui interpelle, silhouettes qui s’emparent de la scène, tout en gardant un semblant de mystère. Les interprètes parviennent à entraîner les spectateurs dans cette ambiance cacophonique. «Tkhalbiza», tel est le titre en tunisien de la pièce d’une durée de 40 mn, s’ouvre en grande pompe. Elle est annonciatrice d’une détresse commune, exprimée nonchalamment, au fil des scènes et des actes. Les interprètes incarnent, 6 personnages atteints de démence, des suites de leur enfermement. Dans le cadre d’un lieu clos qu’on confondrait avec un hôpital psychiatrique, reconstruit sur scène, ils expriment en solo ou en groupe, à gorge déployée, les raisons d’une folie. Le texte, la mise en scène et l’interprétation sont réalisés par ce même noyau. «Tkhalbiza» ou «La sagesse d’un fou» est un essai scénique amateur criant de cynisme et de mélancolie. Les présentations des pièces de théâtre réalisées par des détenus ont pris fin le jeudi 8 décembre 2022. Un prix sera décerné à la meilleure création.
L’effet escompté chez les écoliers s’est fait sentir lors d’une visite peu ordinaire effectuée à l’école primaire «El Marr» à Tunis. Toute une salle, au sein de l’école, a été transformée pour le plus grand bonheur des petits. «Qismi Al Ahla» (Ma classe est la meilleure) poursuit sa route.
C’est à l’école «El Marr» à Tunis, située derrière le ministère de la Défense, qu’un groupe de visiteurs a été accueilli et par le corps administratif de l’école, par les élèves, et par quelques responsables à la tête de ce programme qui vise «à créer démocratiquement la meilleure salle de classe», comme c’est présenté. Ce projet, qui est à vocation sociale, est concrétisé sous la houlette de l’Association l’Art Rue.
S’investir dans les écoles primaires
Le programme vise à accompagner et à soutenir financièrement des associations locales, ou régionales afin de créer des espaces dédiés à la pratique des arts au sein des écoles primaires publiques et à fournir par conséquent un endroit rénové pour les écoliers, situé au sein même de leur établissement, leur permettant ainsi d’apprendre, tout en s’amusant. Une initiative qui a porté ses fruits par le passé et qui continue à être impactante.
Club de théâtre, jeux de société, activités en groupe, projections, activités manuelles, musique peuvent être pratiqués au sein de cette classe. Un espace stimulant, qui entretient l’éveil artistique juvénile : autonomie, créativité, passions, imagination, doté d’un espace vert. L’expression artistique s’apprend dès l’enfance, et la classe est conçue pour. L’art à la portée des enfants–écoliers, telle est la devise de ce projet doté d’un programme d’accompagnement, d’objectifs précis à atteindre, d’un soutien financier et d’un protocole. Les associations engagées peuvent s’investir dans les écoles primaires et permettre l’élaboration de ce programme dans les écoles primaires de Tunis et des régions. Le cas «D’el Marr» est une simulation.
L’exposition rétrospective «Alaïa avant Alaïa» retrace la jeunesse et l’enfance d’Ezzedine Alaïa. Elle revient sur sa naissance à Tunis, son départ pour Paris en 1956 et annonce son ascension progressive et fulgurante au fil des décennies, en tant que couturier-créateur de renommée mondiale.
Discrétion, finesse, justesse et une infinie sensibilité ont façonné et façonnent toujours l’œuvre et son maître. Auparavant et jusqu’à sa disparition, ses créations ont sublimé et épousé la silhouette d’une large pléiade de personnalités et de stars mondialement connues. Sculpturales et enveloppantes, elles ont, durant toute une vie, brillé de mille feux dans les occasions, les mondanités et les défilés de mode les plus connus dans le monde. L’exposition nous le relate bien à travers des photos anciennes, privées, familiales, mais également à travers celles qui immortalisent ses apparitions publiques aux côtés des grandes stars, et d’autres remarquables, capturées dans toutes les métropoles.
Un court-métrage de 8 mn permet aux invités présents de regarder un reportage / entretien filmé avec le jeune Ezzedine Alaïa, s’adonnant à des confidences sur son enfance, racontant sa tendre jeunesse passée à la Médina de Tunis, une partie de sa vie dans les Beaux-Arts de Tunis jusqu’à son envol pour la capitale des lumières. Le film court évoque références, techniques de couture, personnes et personnalités qu’il a habillées à l’époque, jusqu’aux années 80, mettant ainsi davantage en lumière la genèse de son génie créateur.
Textes courts, éclairants, informations édifiantes, cartels, dates clés et personnalités amis, que le styliste affectionnait particulièrement, jalonnent les murs de son havre de paix, une demeure, perchée sur les hauteurs de Sidi Bou Saïd, à la vue imprenable sur la Méditerranée. Ce lieu ensorcelant met encore en lumière le parcours unique et éclectique d’Alaïa… Chez lui. Cette maison rappelle ses origines, son pays natal, ses racines. Construite en 1986, l’artiste y passait le plus clair de son temps. Connue sous l’appellation courante «Dar Alaïa», elle est désormais reconvertie en lieu d’exposition, consacrée à l’œuvre et à la vie d’Alaïa. Sept créations à lui y sont exposées : elles ont été créées au début de sa carrière.
Nous apprenons, au fil de cette rétrospection, que le créateur passait son temps à habiller ses proches amies, devenues ses muses comme sa sœur Hafida, son amie Latifa, Nicole de Blégiers ou Leila Manchari, avant d’inspirer un nombre incalculable de personnalités à travers le monde. Greta Garbo, Louise de Vilmorin ou Arletta l’ont fait connaître dans les plus hautes sphères sociales. Grace Jones, Tina Turner, Naomi Campbell, Farida Khelfa et bien d’autres ont traversé la vie de Alaïa.
Le portrait d’un créateur, à la fois discret, mais éclatant de talent, est raconté dans «Alaïa avant Alaïa», une exposition, hommage déjà présentée à Paris et désormais accessible à Tunis-Sidi Bou Saïd jusqu’en mai 2023. Une exposition qui a puisé dans les archives de la fondation Alaïa et qui fusionne citations du créateur, hommages photographiques, témoignages. L’expo prend une dimension plus intime puisqu’elle se tient dans sa maison : elle est truffée de détails et lève le voile sur les nombreuses personnes et personnalités qui ont accompagné Alaïa depuis sa naissance jusqu’à l’éclosion de sa carrière. Davantage de créations exposées auraient donné plus d’ampleur à l’exposition. Pour les connaisseurs, intéressés par la vie d’Azzedine Alaïa, un des pionniers de la mode mondiale, un détour en accès libre à Dar Alaïa est recommandé.
Dar Alaïa à Sid Bou Saïd (Crédit Photo : Sylvie Delpech)
Paru aux éditions Orizons, « Bonjour monsieur Bussac » est un ouvrage de Raouf Medelgi, professeur – universitaire, spécialiste en langue française – littérature caribéenne. L’auteur passe au crible les écrits et la vie de l’écrivain François G.Bussac en se basant sur son vécu en Tunisie durant plus de 15 ans et sur ses histoires de famille ancrées dans notre pays. François G.Bussac (dit le Capitaine) a, depuis, regagné la France. Cette rencontre autour d’un livre retrace une tranche de vie. Entretien.
« Bonjour monsieur Bussac : Itinéraire d’un écrivain des deux rives » vient de paraître aux éditions Orizons. Il s’agit de votre tout premier livre édité autour de la vie et des écrits de François G. Bussac. Un ouvrage qui a été conçu suite à un échange amical, spontané et drôle …
Pour remettre le texte dans son contexte et l’histoire dans son sillage, c’était autour d’un déjeuner avec Monsieur Bussac, chez Martine Gafsi, la comédienne. (rire). Nous discutions de « biographies d’auteurs ». Et spontanément, pour rire, j’ai dit à monsieur Bussac : « On devrait écrire une biographie sur vous ». (Rire). Comme il a plus que 25 ouvrages à son actif et qu’il a longtemps écrit des nouvelles, des romans et des livres pour enfants, on l’a furtivement pensé. Et ce n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd… (rire) Quelques jours plus tard, on était chez lui au sémaphore à La Goulette et notre écrivain revient sur cette proposition. Il m’a exprimé sa volonté de le faire à condition que le livre soit davantage focalisé sur la relation France / Tunisie : d’où le titre « Itinéraire d’un auteur entre deux rives ». J’ai toujours écrit mais je n’ai jamais donné à lire mes textes à quelqu’un (ou rarement) et l’exercice s’annonçait dur. Le faire, c’est se lancer dans une aventure et comme l’auteur concerné est un ami, on se dit finalement, pourquoi pas ? Il faut éviter le pathos, l’emphase : il faut trouver le ton juste et celui qui donnera envie de découvrir l’univers Bussac. On l’a construit donc ensemble : il s’agit d’une collaboration, entre nous deux et avec nos amis, notamment journalistes, écrivains et universitaires.
Comment ce livre illustre-il cette relation entre les deux rives de la France et de la Tunisie ?
J’aime bien appeler ce livre « Le pont », aussi simple que soit ce mot. On est dans cet « entre-deux », et nous pouvons saisir ce trait d’union qui unit les rives tunisiennes et françaises. Il ne faut pas oublier également ce lien indéfectible qui lie François G. Bussac à la Tunisie. En effet, pour donner envie et pour parler juste, son grand-père et sa mère ont vécu un temps dans notre pays. Je garde le suspense pour les lecteurs … et de là, a commencé la construction de ce pont. Cet héritage familial a fait que François-George a toujours eu un attachement fort à notre pays. Une relation que je n’ai pas décelée dès le départ : Lui, il était directeur des médiathèques de Tunisie, moi j’ai été journaliste, et on n’avait pas au départ des atomes crochus : on a appris à se connaître bien après, avec la création de la troupe des « Vives voix ». Je suis resté fidèle à cette idée de « pont » et d’appartenance.
Ce livre rend-il hommage à l’écrivain – Capitaine ?
Oui. Il a passé 15 ans de sa vie et la fin de sa carrière en Tunisie. Il a choisi de rester ici après son départ à la retraite et de ne pas rentrer en France. Le Capitaine a beaucoup écrit en ayant ce regard à la fois juste, amusé et parfois inquiet sur la Tunisie. C’est un hommage à l’histoire familiale, aux amitiés tunisiennes et un regard sur les aléas du pays. Il n’y a qu’à voir ses chroniques sur la révolution pour saisir leur force. « Bonjour monsieur Bussac » est un livre qui nous ouvre par petites bribes, par truchement, l’univers de l’écrivain, son antre. Ce livre est un hommage à sa manière d’écrire, à l’écrivain et à l’homme. Le Capitaine est un personnage, qui marque et interpelle toutes celles et ceux qui l’ont connu de près ou de loin, dans le cadre professionnel ou personnel : il a une présence, une prestance, une voix qui remplit l’espace. Il ressemble à un personnage qui sort d’un roman. Un alchimiste qui attirerait le monde autour de lui : on peut l’aimer, avoir de l’affection pour lui, lui en vouloir aussi (mais pas pour très longtemps). L’amitié fait des miracles : mais écrire sur quelqu’un fait encore plus de miracles parce qu’on découvre des choses. On se laisse aller dans des confidences et parfois on devine des choses derrière l’écriture. Quand on lit l’œuvre, on devine des choses après : Il y a une authenticité qui se dégage, il y a une sincérité qui transparaît, qui glisse. C’est un ami des lecteurs, un écrivain-ami, un beau mélange. « Bonjour monsieur Bussac : Itinéraire d’un écrivain des deux rives » paraîtra d’ici un mois en Tunisie aux Editions Arabesques.
Une expérience éducative pilote se poursuit depuis 2016, celle des « Mille et un films», programme national pour l’introduction de l’instruction cinématographique dans les écoles tunisiennes, avec à sa tête, son fondateur, le réalisateur Moncef Dhouib. Après trois ans d’itinérance fructueuse de 2016 à 2019 et un arrêt causé par la pandémie, l’expérience redémarre de plus belle. 6.000 écoliers ont été initiés au b.a-ba du 7e art.
En 2023, un nouveau chapitre des «Mille et un films» s’apprête à commencer. Soutenu par le ministère de l’Education actuel, le projet continue d’impacter. Sur 24 gouvernorats, 12 écoles par gouvernorat ont été visitées. Durant trois ans, 6.000 écoliers, pour la plupart issus de régions défavorisées, ont pu participer à ce travail.
Ecoliers /collégiens des écoles primaires et collèges situés dans des régions rurales (voire complètement isolées) reçoivent la visite de formateurs, spécialistes en cinéma. Ces derniers s’adressent au corps enseignant d’une école : ils lui présentent le projet, son objectif, et valorisent une passion et un savoir à entretenir avec les élèves. Des enfants qui restent à l’affût de ce savoir pratique, édifiant et très divertissant et qui s’y engagent passionnément. «Depuis le lancement de ce projet, j’ai toujours pensé qu’il faut travailler avec les écoles, en premier lieu. On a donc pensé cibler les moins de 14 ans, qui sont en train de se chercher, et qui n’ont pas conscience des maux de la société et des difficultés de la vie. A un certain âge, on peut perdre à jamais les jeunes, si on ne les rattrape pas avant et tôt», déclare Moncef Dhouib, réalisateur et chef du projet. Deux partenaires fixes soutiennent les «Mille et un films» : le ministère de l’Education et celui des Affaires culturelles (à travers le Cnci, qui aide à la production et à la formation).
L’essentiel du travail, c’est de le transmettre en formant les formateurs : ces instituteurs qui veilleront à leur tour à maintenir ces ateliers d’initiation cinématographique pour garantir la pérennité de la formation dans l’établissement éducatif désigné et de le programmer sur la durée dans le planning des activités culturelles. Ces enseignants-formateurs doivent être passionnés et porteurs du projet. Toutes et tous ont adopté le projet.
Une initiative ancrée dans son époque
« Ce que nous faisons est nécessaire : nous sommes analphabètes quand il s’agit de lire une image. A travers ce projet, nous consolidons notre savoir, afin de mieux décrypter ce tsunami de l’image, sa fabrique, son impact. D’où cette urgence de commencer tôt à initier à la fabrique de l’image. Nous entretenons l’aspect pédagogique du secteur cinématographique. Le langage cinématographique doit être à la portée de tout le monde, en premier lieu, accessible aux enfants de 8 / 14 ans. Le cinéma est indissociable à l’ère numérique, de nos jours. Il est digital, très présent en ligne, et fait de l’ombre à l’écrit car tout est image, virtuel, reportages, et documentaires de nos jours», précise Moncef Dhouib.
Grâce au ministère de l’Education, l’accès aux établissements éducatifs se fait plus facilement. Le Cnci fournit des formateurs, diplômés pour la plupart des écoles supérieures de cinéma : ils doivent être principalement cadreurs, spécialistes en image et monteurs. Une dizaine d’entre eux/elles est retenue via des appels à candidatures. A part leur savoir, ils/elles doivent posséder un permis de conduire. Ces mêmes formateurs sillonnent, en effet, la Tunisie, via des unités mobiles, en duo, équipés du matériel nécessaire à l’application du projet. Un engagement sans faille de la part de «ces ambassadeurs du 7e art», composés de 5 femmes et 5 hommes (parité oblige).
Ce travail de longue haleine se fait sur plusieurs séances et en fonction des écoles disponibles. Il est composé de trois étapes : la première se fait théoriquement en initiant aux bases du cinéma, via un document élaboré et qui explique en détail les règles élémentaires du cinéma. La 2e est l’écriture du scénario et son illustration, individuellement, mais surtout en groupe. La 3e étape permet aux écoliers-participants de faire du terrain, de sortir, et d’appliquer leur savoir sous l’œil vigilant des formateurs-enseignants et avec l’autorisation des parents d’élèves.
Le projet illustre ce mariage entre culture et Intelligence artificielle : la culture, autrefois orale et écrite, est désormais convertible en numérique, accessible sur des plateformes en ligne, et forte de sa connectivité via les tablettes, le web et les réseaux sociaux. Le projet s’inscrit dans son époque et permet une meilleure lecture de l’Image : une jonction qui lie la culture, l’éducation et la technologie.
«Le projet reste coûteux : des dépenses se font, mais il a fonctionné de cette manière structurelle», cite Moncef Dhouib, enthousiaste. Il tient à rempiler pour une nouvelle tournée des écoles, et à effectuer un redémarrage postCovid. Le projet est toujours à la recherche d’un soutien financier privé. «Mille et un films » est précurseur dans la région Mena et son exportation dans d’autres pays reste imminente. Un legs de cette expérience pour les générations futures et son rayonnement à l’intérieur du pays et au-delà des frontières restent impératifs.
Une expérience éducative pilote se poursuit depuis 2016, celle des « Mille et un films», programme national pour l’introduction de l’instruction cinématographique dans les écoles tunisiennes, avec à sa tête, son fondateur, le réalisateur Moncef Dhouib. Après trois ans d’itinérance fructueuse de 2016 à 2019 et un arrêt causé par la pandémie, l’expérience redémarre de plus belle. 6.000 écoliers ont été initiés au b.a-ba du 7e art.
En 2023, un nouveau chapitre des «Mille et un films» s’apprête à commencer. Soutenu par le ministère de l’Education actuel, le projet continue d’impacter. Sur 24 gouvernorats, 12 écoles par gouvernorat ont été visitées. Durant trois ans, 6.000 écoliers, pour la plupart issus de régions défavorisées, ont pu participer à ce travail.
Ecoliers /collégiens des écoles primaires et collèges situés dans des régions rurales (voire complètement isolées) reçoivent la visite de formateurs, spécialistes en cinéma. Ces derniers s’adressent au corps enseignant d’une école : ils lui présentent le projet, son objectif, et valorisent une passion et un savoir à entretenir avec les élèves. Des enfants qui restent à l’affût de ce savoir pratique, édifiant et très divertissant et qui s’y engagent passionnément. «Depuis le lancement de ce projet, j’ai toujours pensé qu’il faut travailler avec les écoles, en premier lieu. On a donc pensé cibler les moins de 14 ans, qui sont en train de se chercher, et qui n’ont pas conscience des maux de la société et des difficultés de la vie. A un certain âge, on peut perdre à jamais les jeunes, si on ne les rattrape pas avant et tôt», déclare Moncef Dhouib, réalisateur et chef du projet. Deux partenaires fixes soutiennent les «Mille et un films» : le ministère de l’Education et celui des Affaires culturelles (à travers le Cnci, qui aide à la production et à la formation).
L’essentiel du travail, c’est de le transmettre en formant les formateurs : ces instituteurs qui veilleront à leur tour à maintenir ces ateliers d’initiation cinématographique pour garantir la pérennité de la formation dans l’établissement éducatif désigné et de le programmer sur la durée dans le planning des activités culturelles. Ces enseignants-formateurs doivent être passionnés et porteurs du projet. Toutes et tous ont adopté le projet.
Une initiative ancrée dans son époque
« Ce que nous faisons est nécessaire : nous sommes analphabètes quand il s’agit de lire une image. A travers ce projet, nous consolidons notre savoir, afin de mieux décrypter ce tsunami de l’image, sa fabrique, son impact. D’où cette urgence de commencer tôt à initier à la fabrique de l’image. Nous entretenons l’aspect pédagogique du secteur cinématographique. Le langage cinématographique doit être à la portée de tout le monde, en premier lieu, accessible aux enfants de 8 / 14 ans. Le cinéma est indissociable à l’ère numérique, de nos jours. Il est digital, très présent en ligne, et fait de l’ombre à l’écrit car tout est image, virtuel, reportages, et documentaires de nos jours», précise Moncef Dhouib.
Grâce au ministère de l’Education, l’accès aux établissements éducatifs se fait plus facilement. Le Cnci fournit des formateurs, diplômés pour la plupart des écoles supérieures de cinéma : ils doivent être principalement cadreurs, spécialistes en image et monteurs. Une dizaine d’entre eux/elles est retenue via des appels à candidatures. A part leur savoir, ils/elles doivent posséder un permis de conduire. Ces mêmes formateurs sillonnent, en effet, la Tunisie, via des unités mobiles, en duo, équipés du matériel nécessaire à l’application du projet. Un engagement sans faille de la part de «ces ambassadeurs du 7e art», composés de 5 femmes et 5 hommes (parité oblige).
Ce travail de longue haleine se fait sur plusieurs séances et en fonction des écoles disponibles. Il est composé de trois étapes : la première se fait théoriquement en initiant aux bases du cinéma, via un document élaboré et qui explique en détail les règles élémentaires du cinéma. La 2e est l’écriture du scénario et son illustration, individuellement, mais surtout en groupe. La 3e étape permet aux écoliers-participants de faire du terrain, de sortir, et d’appliquer leur savoir sous l’œil vigilant des formateurs-enseignants et avec l’autorisation des parents d’élèves.
Le projet illustre ce mariage entre culture et Intelligence artificielle : la culture, autrefois orale et écrite, est désormais convertible en numérique, accessible sur des plateformes en ligne, et forte de sa connectivité via les tablettes, le web et les réseaux sociaux. Le projet s’inscrit dans son époque et permet une meilleure lecture de l’Image : une jonction qui lie la culture, l’éducation et la technologie.
«Le projet reste coûteux : des dépenses se font, mais il a fonctionné de cette manière structurelle», cite Moncef Dhouib, enthousiaste. Il tient à rempiler pour une nouvelle tournée des écoles, et à effectuer un redémarrage postCovid. Le projet est toujours à la recherche d’un soutien financier privé. «Mille et un films » est précurseur dans la région Mena et son exportation dans d’autres pays reste imminente. Un legs de cette expérience pour les générations futures et son rayonnement à l’intérieur du pays et au-delà des frontières restent impératifs.