Parfois, en étant au bon endroit et souvent aux bons moments, des femmes se connectent au théâtre tout en s’attelant à leur travail initial : mettre de l’ordre dans les loges. Dans «Coiffeuse», Marwen Errouine leur rend un hommage chorégraphié.
La scène est la reconstitution d’une loge contenant une « coiffeuse » avec un miroir. En temps normal, dans la vraie vie, une pléiade de comédiens y défile au fil des spectacles : ils se coiffent, se maquillent, enfilent ensuite des vêtements accrochés dans des cintres et se reposent éventuellement sur un canapé : discussions à n’en plus finir, blagues, rires, et sautes d’humeur habitent l’envers des créations théâtrales constamment. Dans « Coiffeuse », le public découvre les coulisses d’un spectacle scénique et dans lequel des préparatifs titanesques se déroulent.
Ce qui est moins visible, pour le public, est que la loge, (dotée d’une « coiffeuse »), est aussi un lieu de vie fréquenté également par des aides-ménagères. En vrai, ces dernières tissent des liens, se familiarisent avec l’endroit, avec l’équipe composée d’artistes, de techniciens, de tout un staff et s’imprègnent par leur travail autour des arts vivants.
Dans « Coiffeuse», trois de ces femmes (interprétées par Malek Zouaidi, Intissar bel Haj Khelifa et Nadia Saiji) débarquent dans une loge désordonnée : avec des vêtements et objets par terre, peu éclairée…pensant y faire leurs tâches respectives, elles commenceront discrètement à s’imprégner par le travail des artistes, leurs accessoires et de leurs espaces de vie, à savoir une scène et ses coulisses. Le spectacle racontera la transition lente mais certaine d’une situation quotidienne asservissante à la scène, lieu d’art et de vies.
« Coiffeuse » d’une cinquantaine de minutes, et dont la dramaturgie est signée Myriam Soufy, est soutenu par une musique de Khalil Soufy : elle est rythmique et fait écho aux mouvements dansants exprimés par ces trois artistes. Un langage difficilement déchiffrable au fur et à mesure mais qui au final, s’ouvre sur un dénouement qui permet au public de faire la connaissance de ces trois vraies aides-ménagères, interrogées sur leur rapport au théâtre au quotidien. Elles travaillent durant des heures dans des salles de spectacles vivants et s’assurent que les équipes s’y sentent bien. Le quotidien de ces femmes se chevauche avec celui des artistes et des artisans du théâtre : elles finissent par voir les spectacles, assistent aux répétitions et aux préparatifs, tissent des liens avec les artistes et finalement, à s’interroger. Peuvent-elles un jour faire du théâtre ? Sont-elles admiratrices de cet art ? Quel impact a le théâtre sur leur quotidien ? Réponses, interrogations et impressions personnelles sont exprimées en guise de clôture mais restent peu perceptibles ou saississable durant tout le spectacle.
Initialement, l’idée de « Coiffeuse » était de mettre sur scène de vraies aides-ménagères et de les diriger avant de finalement léguer le travail à des interprètes. Une représentation a eu lieu à la Cité de la culture pendant le mois de Ramadan.
Une parenthèse musicale nommée « Sinouj » a conquis son public, grâce à sa justesse sonore, sa fusion instrumentale éclectique et une mise en scène visuellement attractive. Benjemy a assuré cette soirée de clôture du festival « Soufiyet », organisée par le Centre des musiques arabes et méditerranéennes (Ennejma Ezzahra) avec une pléiade d’artistes.
En plus de son effusion sonore recherchée, « Sinouj » se caractérise par la richesse de ses artistes-participants et leurs instruments : Houyem Ghattas au violon, les voix de Haythem Hadhiri et Abdesslem Ben Souiden, sans oublier, le duo Montasser Jebali-Elyes qui a ajouté des sonorités rythmiques et traditionnelles retentissantes, en maniant la « darbouka », le « mézwed » et la « zokra ». La lumière, les bougies, les habits, les bijoux (signés Kahena Collection) sont les atouts forts du spectacle. Un moment musical de plus d’1h20 qui se vit. Les invités se sont laissés imprégner par ce moment musical et en partie spirituel.
Initialement, « Sinouj » est un projet solo, mais qui n’a pas tardé à s’agrandir. Il a été conçu dans le cadre du « Sicca Jazz » dans des formats solo et se caractérisait principalement, au départ, par ses sonorités électroniques. L’idée de créer une troupe autour du projet a été concrétisée par la suite : le public a pu voir le résultat sur la scène d’Ennejma Ezzahra. Il s’agissait d’un premier jet, un premier essai en groupe maintenu à l’occasion de la clôture de « Soufiyet » 2022, le festival organisé à l’occasion du mois de ramadan.
Le spectacle oscille entre musique « populaire » et « soufi ». L’électronique habille tout le répertoire du spectacle. Initialement, « Sinouj » est instrumental et est élaboré autour d’une recherche approfondie sur le rythme. Le dosage entre les genres musicaux était juste, autre atout fort du spectacle. « Mon rêve, c’est d’enrichir ‘‘Sinouj’’ de 30 à 40 talents sur scène », confie Benjemy. Le rendre adaptable à des soirées nocturnes et à d’autres lieux fait partie des objectifs de l’artiste.
Un Marvel pas comme les autres a pris d’assaut les salles de cinéma tunisiennes lors d’une sortie mondiale qui a eu lieu la veille du Ramadan. « Morbius » de Daniel Espinosa est le premier Marvel consacré à cet anti-héros vampirique interprété par un Jared Leto, plus sanguinaire que jamais.
Distribué par Pathé BC Afrique, le blockbuster compte par les plus attendus de l’année. D’une durée d’1h45 (seulement), il s’agit du premier film consacré à ce super-héros complexe et inclassable : oscillant entre le Bien et le Mal, ne sachant pas où se situer, tiraillé entre son amour pour la vie, la science, le progrès de la médecine ou remédier à sa maladie rare et incurable du sang, le docteur et chercheur « Michael Morbius », de son vrai nom, s’essaie à des expériences dans un laboratoire et… qui s’avéreront désastreuses.
Cet Homme de science va fusionner les gènes d’un ADN humain à du sang de chauve-souris, ce qui le transformera en une créature assoiffée de sang, mi-humaine, mi-bête sanguinaire. Le film est construit essentiellement sur une histoire d’amitié entre deux enfants, tous les deux atteints de cette forme de leucémie rare et élevés par un mentor. Deux enfants livrés à eux-mêmes, inséparables, et qui grandiront ensemble, luttant des années durant contre ce spectre de la mort… Ensemble jusqu’à ce qu’une folie furieuse et un excès de manipulation génétique les séparent.
« Morbius » est sans doute l’un des anti-héros les plus sombres, les plus féroces, et les plus violents que Marvel et Sony Pictures ont pu concevoir en B.D. On s’attache difficilement à cette créature : on comprend moyennement ses choix de vie, ses réactions, son adaptation difficile aux états d’âme humains et bestiaux. Un héros qui traîne un côté énigmatique, souvent insaisissable. Son parcours reflète surtout son tiraillement entre pulsions inhumaines et sentiments nobles : les émotions d’un amoureux éperdu, d’un ami fidèle qui deviendra ennemi redoutable, d’un médecin dévoué pour ses patients. Matt Smith interprète l’ami/ennemi en question.
Le film rappelle les deux longs-métrages consacrés à « Venom », un autre héros Marvel, sujet à des expériences scientifiques qui tourneront mal : « Morbius » attise les discussions entre les fans de DC Comics, Marvel, Disney et Sony Pictures. Les Crossovers, clins d’œil et autres indices se référant à d’autres super-héros comme Spider-man ou Dr Strange, pullulent, nourrissant ainsi cette immense industrie du cinéma hyperprisée de nos jours. Un cinéma divertissant, attractif, qui nourrit l’imaginaire des enfants, des jeunes, mais également de jeunes adultes depuis déjà des années durant. Le démarrage au Box mondial de « Morbius » a bien eu lieu. L’occasion de fréquenter les salles de cinéma en Tunisie en compagnie de ses enfants, le soir ou pendant une journée ramadanesque.
C’était comme si nous nous étions égarés dans un fief de monstres ! Des petites aux grandes bêtes en passant par celles qui s’apprêtent à éclore, toutes entraînent le visiteur à Central Tunis, désormais l’antre d’Amir Chelly jusqu’au 31 mars 2022. A travers son art, le créateur nous fait aimer ses propres « monstres ».
Cette déambulation artistique s’est faite au 42, rue Ben-Ghedhahem. Passants et visiteurs sont comme happés à l’intérieur, attirés par le son redondant d’une berceuse. Un son qui accompagne les plus curieux, une fois sur place, tout au long de la visite. « I’m a Monster » (Je suis un monstre) est bel et bien le titre révélateur de l’exposition-monstre d’Amir Chelly, jeune artiste tunisien, inscrit en thèse de doctorat à l’unité de recherche Esthétiques et Pratiques des arts de l’Institut supérieur des beaux-arts de Sousse. Chelly a participé furtivement à une exposition auparavant, bien avant d’arriver à mener à bout « I’m a Monster », sa première exposition officielle, tenue à Tunis.
Le travail dans sa globalité fusionne « peintures et sculptures », visible sur les murs de l’espace et au sol : une création élaborée dans une esthétique attrayante, riche en couleurs, en formes diverses et qui dessine le milieu où vivent ces monstres en apparence, pour la plupart, « presque » inoffensifs : des bestioles tantôt attachantes, tantôt repoussantes. L’exposition plastique échappe à l’espace – temps, prend place dans notre réalité ordinaire, en lui ajoutant un zeste de fantaisie, de fantastique, le temps d’une découverte. Toutes les formes conçues et exhibées sur place par l’artiste déforment totalement notre imaginaire déjà développé autour de la figure des monstres, d’où cette volonté de la déconstruire. Un imaginaire collectif qui a puisé dans la littérature, la culture sérielle, les films, les dessins animés et qui est désormais enrichi par la touche de Chelly.
Des physiques hybrides, des yeux globuleux, des corps tantôt humains, tantôt animaliers, des visages déformés, des ailes d’anges ou des oiseaux sur des corps d’enfants, cette monstruosité exprimée titille notre conception classique des monstres et offre une vision inédite, faite de plusieurs disciplines : une technique que l’artiste tient à appliquer. Trêve de frontières entre les disciplines. L’influence mythologico-grecque se fait d’ailleurs sentir dans son expo-monstre que l’artiste voudrait « transgressive », échappant aux normes. Il dissocie l’aspect maléfique souvent attribué à la figure des monstres, ayant une présence « repoussante » et « effrayante », et souligne cette dualité oxymorique qui caractérise son travail truffé de notions contradictoires : le beau et le laid, la tristesse et la joie, la douceur et la crainte, la féérie et la monstruosité, le diabolique et l’angélique, le céleste et le terrestre. Une vision globale qui ne laisse pas le récepteur indifférent. L’exposition monstrueuse d’Amir Chelly se poursuit jusqu’au 31 mars 2022, au 42, rue Ben-Ghedhahem, Central Tunis.
Le noir et blanc sur grand écran continue de conquérir le box-office. « Belfast » de Kenneth Branagh sort dans toutes les salles du monde : l’accueil commercial et critique est au rendez-vous, puisqu’il rafle, déjà, pas moins de 7 nominations aux Oscars. Le long métrage s’arrête sur une période houleuse du XXe siècle, marquée par des affrontements entre civils à caractère religieux.
« Belfast » raconte la chasse des catholiques, vue à travers les yeux de Buddy, un enfant de 9 ans, qui grandit au sein d’une famille d’ouvriers respectée, au nord de la cité de « Belfast ». Ils résident dans un quartier paisible de cette grande ville ouvrière dans lequel protestants et catholiques y vivaient ensemble en parfaite symbiose, jusqu’au jour où des émeutes violentes éclatent : c’était en plein été 1969. Le déchirement commence alors et pour Buddy et pour ses deux parents, incarnés par Jamie Dornan et Caitriona Balfe, qui font face à une vague de violence sans précédent : leur sécurité devient leur principal souci. Les parents, les grands-parents et les enfants, au sein de cette famille, tiennent toutes et tous par tous les moyens à leur terre, refusant de partir. A travers les yeux de cet enfant cadet, tout un paysage chaotique s’est créé, fait de sectarisme, de séparatisme entre bons et méchants, pieux catho ou protestants, banditisme, délinquance, conflits et frontières entre communautés.
Une guerre civile était définitivement lancée. Le réalisateur du film s’est librement inspiré de son enfance et de son propre vécu pour reconstituer cette époque tragique de l’histoire de l’Irlande du Nord.
L’enfant acteur Jude Hill, principal personnage du film, interprète remarquablement bien le rôle de Buddy : sens de la répartie, énergie, humour débordant, légèreté, réflexions d’adultes et sensibilité soulèvent l’histoire et sa trame, face à des parents à la présence physique électrique et au jeu d’acteur sobre et élégant : un duo solidaire pour sauver leur famille et aspirer toujours ensemble à une existence meilleure, dans l’ici ou l’ailleurs. Il est difficile d’évoquer cette guerre civile sans dessiner ce dialogue générationnel entre enfants (Buddy et son frère), leurs parents, et la génération des grands-parents, interprétée par Judi Dench et Ciaran Hinds. Deux personnages âgés à la présence apaisante, touchante et même drôle, mais dont l’existence est peinte volontairement dans le film d’une manière creuse et superficielle.
« Belfast » a le mérite d’être authentique et sincère dans son propos : le réalisateur était soucieux de ne pas peindre autrement l’histoire, mais plutôt de la raconter différemment.
Quelques références à un cinéma d’antan sont glissées, notamment un clin d’œil à l’ancienne version de « Thor » que Branagh finira par réaliser en 2011. L’esthétique du film est incontestablement son point fort : «le noir et blanc» utilisé accentue les sentiments, les ressentis et l’aspect émotionnel chez les personnages n’est pas forcément synonyme de drames ou de malheurs : il met même en exergue les décors, les costumes, la mimique des protagonistes.
Riche aussi d’une mise en scène maîtrisée, « Belfast » rappelle incontestablement d’autres scénarios ayant eu beaucoup de succès ces derniers temps citant « Jojo Rabbit » de Taika Waititi, qui raconte la chute de l’Allemagne nazie à travers les yeux d’un enfant, ou le Mexique de l’enfance d’Alfonso Cueron, reconstitué dans « Roma », également filmé en noir et blanc. Branagh prouve une fois de plus que les Marvel ne sont pas son seul dada. Distribué par Pathé BC Afrique, le film est programmé actuellement dans les salles tunisiennes.
Une spirale de sons s’est abattue sur les hauteurs du Kef, en plein mois de mars, à l’occasion du concert attendu de Guillaume Perret, saxophoniste et jazzman français, venu présenter en exclusivité «Simplify», son dernier projet en date.
«J’ai choisi de vous le présenter, en première, public tunisien, en y apportant peut-être quelques changements à l’avenir», déclare l’artiste, enthousiaste face à un public médusé. Sa musique, sur plus d’1h15, électrise à souhait, par son mélange inédit entre jazz, électro, et quelques touches d’heavy métal, et son oriental. Une maîtrise instrumentale précise qui tombe dans l’oreille d’un mélomane.
Perret, accompagné de Tao Ehrlich aux drums, s’empare de la scène du Centre des arts dramatiques et scéniques du Kef, ne communiquant qu’à travers sa musique. Son répertoire, préparé à l’occasion, paraît insaisissable au départ, jusqu’à ce qu’il prenne une dimension singulière et universelle particulière. Une musique festive et gaie qui parvient à conquérir. Trêve de frontières entre genres musicaux présentés sur scène, l’artiste affiche de loin sa caractéristique : De la musique Jazzy électro, génératrice d’émotions diverses.
Ce concert, le deuxième pour Perret, est effectué dans le cadre du « Sicca Jazz». Son genre musical est puisé dans les cultures du monde. L’artiste pioche dans le patrimoine musical de nombreux peuples et contrées et l’insuffle dans ses compositions, comme celles qui font le projet «Simplify». Une musique qui s’adresse aux peuples du monde, hymne sonore à la paix, à la tolérance et pour un monde ouvert. Le projet «Simplify», titré «simple» en anglais, reste ficelé, et musicalement élaboré. Au bout d’1h15 de temps, Perret part sous les applaudissements, et en présence sur scène des artistes Mahdi Nassouli et Karim Ziad. Les deux viennent annoncer leur prochaine soirée, attendue pour le 17 mars 2022 (hier). La ville du Kef continue à vivre au rythme de cet événement musical d’ampleur dans la région, habituellement, maintenu à la Kasbah. La scène libre du festival ne s’est pas tenue dans la journée du 16 mars 2022. D’autres noms viendront enrichir et la petite scène et la scène principale du «Sicca Jazz». La clôture est attendue pour le 20 mars 2022.
Le premier long-métrage de Mohamed Ali Nahdi puise dans des évènements majeurs qui ont fait et défait l’actualité houleuse, et souvent violente d’une Tunisie postrévolutionnaire, entachée par des dérives terroristes, depuis le déclenchement de la Révolution de 2011. Nécessaire, certes, mais redondant.
L’histoire peint une Tunisie amochée par une crise politique majeure, celle de 2011 et de sa dite «révolution du Printemps ou du Jasmin». Le scénario resitue son public dans une période de la Tunisie qui paraît lointaine, et rafraîchit la mémoire d’un peuple tunisien, jusqu’à nos jours, meurtri mais résistant, à l’aide d’images d’archives, de reportages médias vrais, tout en relatant l’histoire de Moez. Ce jeune Tunisien est issu d’un milieu défavorisé, dont le rêve est de devenir comédien, et qui voit sa vie prendre un tournant inattendu, un jour, lors d’une interpellation policière. Le destin de Moez se confond avec celui d’un fanatique religieux beur aux desseins dangereux. Commence alors une course-poursuite pour semer les autorités, jusqu’à immersion dans l’endoctrinement religieux et la fabrique du terrorisme, ou comment créer des bombes humaines à retardement.
Sans beaucoup dévoiler l’intrigue exacte, le film oscille entre scènes d’action, d’affrontements entre forces de l’ordre et courants extrémistes. Moez se retrouve embourbé dans une situation qui le dépasse, aux répercussions conséquentes et sur sa personne, mais aussi sur sa famille et ses proches. Démuni, il se laisse happer dans une succession d’évènements… jusqu’à voir une lueur au bout du tunnel ?
Les échanges des deux protagonistes dévoilent au fur et à mesure un aspect de leurs deux personnalités, deux hommes totalement à l’opposé l’un de l’autre, mais qui finiront par tracer ce bout de chemin périlleux ensemble et malgré eux.
«Moez : Le bout du tunnel» est un essai sur grand écran qui fusionne fiction et aspect documentaire. En alternant récit fictif et véritables extraits de faits réels, comme les attaques terroristes au musée du Bardo, ou des reconstitutions, comme le meurtre de feu Chokri Belaïd, le spectateur se perd dans des scènes saccadées, à la portée initialement nécessaires. Les deux acteurs principaux Saïf Manaï et Akram Mag portent le film tout au long de cette route périlleuse vers la mort. «Moez : le bout du Tunnel» est une histoire fictive virevoltante, vue et revue, traitée différemment dans un nombre incalculable de films étrangers et tunisiens. Un long-métrage qui se distingue, néanmoins, par son aspect documentaire utile, contre l’oubli.
Ce projet devait être une série télévisée avant de se convertir en long-métrage, qui a pris des années à voir le jour. Leïla Chebbi, Slah Msaddak, Lamine Nahdi, et des acteurs, comme Mohamed Ali Midani et Moncef Aguengui sont à l’affiche. Après une série de courts-métrages, Mohamed Ali Nahdi souligne la nécessité de s’arrêter sur cette époque difficile de l’histoire de la Tunisie.
C’est lors d’une expo-vente organisée au Kram sur 4 jours que « La Thébaïde », De sol y tu, un recueil de poèmes de Naomi Nantois Meadows, illustré par Mari Eyries, a été présenté au public. Le recueil a été autoédité et imprimé en risographie.
Les deux conceptrices du recueil et de l’exposition, connues aussi sous le nom de « Nao Maltèse » et « Mewsgraphics » étaient présentes pour ce lancement, inauguré dans un lieu privé. En premier lieu, elles invitent les visiteurs à voir, pendant quelques minutes, dans une chambre, un film court qui immisce les visiteurs dans un univers de poésie illustrée et lue à haute voix, avant de leur faire découvrir, ensuite, le contenu de la petite exposition de « La Thébaïde – De sol y tu ». Tableaux, cartes postales, recueil en deux versions, sont disponibles en édition limitée.
La majorité des textes poétiques de Nao Maltèse ont été rédigés il y a trois ans dans le lieu où a été organisé l’événement. La thématique générale qui traverse l’ouvrage est bien « La solitude ». Le titre « La Thébaïde », se réfère à un endroit isolé, lointain, dans lequel une personne peut se recueillir en solitaire, se retrouver, être en paix avec elle-même. Naomi et Mari sont amies d’enfance. Mari, qui est graphiste, faisait partie des rares personnes qui connaissaient les poèmes de Nao. Elles ont, au final, fusionné leur travail. Mari a donné libre cours à son inspiration pour pouvoir illustrer cette poésie, en technique risographique, et autres. Une technique distinguée qui donne une texture unique aux impressions.
Ce travail a été retardé maintes fois à cause de la pandémie du covid-19. Le recueil a été édité à Paris. D’autres événements, au-delà de ces trois jours, se tiendront sur Tunis. Tout a été autofinancé pour ce premier rendez-vous avec le public. Un chapitre qui s’appelle « Quiproquo » paraîtra prochainement.
Le réalisateur montant, Mike Mills, continue à tisser ses derniers longs métrages autour des relations familiales. En noir et blanc, «Nos âmes d’enfants», actuellement dans les salles, traite du thème de la parentalité, avec, à l’affiche, un Joaquin Phoenix bouleversant d’humanité, une esthétique prenante… Dans le but d’éclipser un récit creux ?
Mike Mills a déjà exploré la figure paternelle dans «Beginners», et celle de la mère dans «20th Century Women». Dans «Nos âmes d’enfants», c’est sur «l’Enfant» qu’il se focalise, en tant que réalisateur et scénariste. Le film s’ouvre sur la vie trépidante et le quotidien très prenant d’un journaliste qui donne libre parole à des jeunes afin qu’ils puissent s’exprimer sur leur avenir sur les ondes de son émission radio. Parallèlement, Johnny entretiendra un lien très fort avec son neveu, qu’il doit garder quelque temps. Sa sœur Amanda le lui livre afin de pouvoir régler une urgence. Un parallélisme s’installera : deux axes seront développés, celui de l’intérêt du journaliste pour «l’avenir des jeunes», sujet entretenu dans le cadre de son travail et sa relation qui le lie à son neveu qui deviendra de plus en plus étroite malgré ses prises de tête et ses égarements.
L’enfant, tel qu’il est interprété dans le long métrage, est fort de sa parole, porteur de réflexions et de messages existentiels (un peu trop lucides pour son âge), ce qui nuit à la crédibilité du personnage. Ce journaliste transpose son sens de l’humanisme dans ces interviews accordées aux enfants et aux jeunes, vivant à travers les Etats-Unis : il est à leur écoute, les situe dans leur environnement, tente de sonder leurs craintes, leurs peurs, leurs déceptions, mais également leurs aspirations et leurs rêves. Des atouts qui transparaissent également dans son lien édifié avec cet enfant curieux, turbulent, et bavard par moments. L’esthétique en noir et blanc était un choix assumé, révélateur d’un univers recherché qui servirait à souligner «l’humain» dans ce récit. Dès le début de la rencontre entre l’adulte et l’enfant, leurs deux existences s’entrechoqueront avant de se synchroniser peu à peu. Un éloge de cet écart générationnel est dressé dans le film.
Le neveu qui questionne le monde sans cesse, à travers sa relation entretenue avec l’oncle, reflète ce récit de la vie racontée avec toute sa maladresse et sa linéarité. «C’Mon C’Mon», dans son titre original, est riche visuellement, esthétiquement, musicalement et parvient à sublimer un Joaquin Phoenix, qui change impeccablement bien de registre, mais il reste à la surface et peine à conquérir.